Victorin Lurel était l'Invité de la rédaction
On poursuit le tour des Domiens qui ont siégé au gouvernement. Comment ont-ils été nommés ? Qu’est-ce que cette fonction a changé pour eux ou pour leur région ?
En 2012, Victorin Lurel alors président du conseil régional de la Guadeloupe reçoit un appel du Premier ministre Jean Marc Heyraut qui lui propose d'être ministre de l'Outre-Mer, sous la présidence de François Hollande.
J'ai d'abord répondu que ça ne m’intéressait pas, car je ne voyais pas la pertinence de systématiquement cantonner les personnalités politiques ultramarines au seul domaine de l'Outre-Mer. J'aurais aussi bien pu être Ministre de l'agriculture, c'est quand même ma formation, ou secrétaire au budget car c'est là que réside le vrai pouvoir !
Néanmoins lorsque François Hollande l'appelle en personne pour lui assurer qu'il est le mieux placé pour ce poste, Victorin Lurel finit par accepter, à trois conditions :
Il était nécessaire de remplacer l'outremer par les outremer au pluriel, car quoiqu'on en dise, nous avons tous nos spécificités. Je ne souhaitais pas non plus dépendre de Bercy mais directement du Premier ministre, et en dernière instance du Président de la République. Enfin, il était important que je puisse désigner moi-même mon cabinet et que j'obtienne un correspondant dans chaque ministère.
S'il souhaite imposer son organisation, c'est notamment car le ministère avait été affaibli par certains de ses prédécesseurs selon ses propres termes. Yves Jégo, ancien secrétaire d’État à l’Outre-Mer, avait ainsi réduit son effectif de près de 330 personnes.
Mais contrairement à ses prédécesseurs, Victorin Lurel était ministre de plein exercice et siégeait donc au conseil des ministres tous les mercredis.
A ce sujet, l'une des premières choses qui m'a frappé en rentrant au conseil des ministres, c'est un tableau avec la lettre N entourée, pour la quatrième dynastie de France, celle de Napoléon. En tant que descendant d'esclavagisés, c'est assez frappant.
Victorin Lurel se distingue aussi par le fait qu'il s'exprime au conseil des ministres sur d'autres sujets que ceux qui concernent strictement les Outre-Mer. Il est d'ailleurs à l'origine de certaines des premières lois de ce gouvernement, notamment sur la régulation économique.
Une liberté d'action relative qu'il mettra en œuvre face aux lobbies du carburant, afin de diminuer la marge de la Société Anonyme de la Raffinerie des Antilles (Sara) et préserver celles des stations-service.
Un arbitrage compliqué qui le poussera toutefois à la démission.
Aujourd'hui encore, je pense qu'on aurait pu faire mieux. Les moyens juridiques existent pour bloquer le prix des carburants. On pourrait le faire demain matin si on le souhaitait vraiment.
Il quitte son poste après la municipale de 2014 et publie un rapport sur les inégalités en Outremer, dont il regrette qu'il n'ait pas été pris en compte par le gouvernement d'Emmanuel Macron.
Écoutez l'intégralité de son intervention au micro de Jean-Marc Pulvar :