Le Sénat, unanime, adopte la proposition de loi contre le narcotrafic

Par 04/02/2025 - 12:50

Le Sénat a adopté mardi, à l'unanimité, une proposition de loi transpartisane pour lutter contre le narcotrafic en France, qui prévoit notamment la création d'un parquet spécialisé et complète l'arsenal répressif contre le trafic de drogue.

    Le Sénat, unanime, adopte la proposition de loi contre le narcotrafic

Les sénateurs ont donné leur feu vert au texte de leurs collègues Etienne Blanc (Les Républicains) et Jérôme Durain (Parti socialiste), qui a reçu un franc soutien du gouvernement représenté par les ministres de la Justice et de l'Intérieur, Gérald Darmanin et Bruno Retailleau.

Adopté dans l'hémicycle avec 338 voix pour et une voix contre - mais cet unique vote contre a finalement été corrigé après une erreur de manipulation lors du scrutin public -, le texte est désormais transmis à l'Assemblée nationale qui compte l'examiner au mois de mars, potentiellement à partir du 17 dans l'hémicycle.

Bruno Retailleau a salué l'adoption d'un "texte fondateur" dans "un combat vital mais souvent trop inégal" contre les trafiquants. "Vous allez nous donner des armes qui permettront de rééquilibrer ce combat", a-t-il dit aux sénateurs.

La proposition de loi propose une nouvelle architecture judiciaire, avec la création d'un parquet national anticriminalité organisée, dénommé Pnaco, spécialisé comme peuvent l'être les parquets financier (PNF) ou antiterroriste (Pnat).

Le Pnaco, qui pourrait voir le jour en janvier 2026, serait chargé des crimes les plus graves - le "haut du spectre" - et constituerait une véritable "incarnation" de la lutte contre le narcotrafic, avec un rôle de coordination des parquets locaux.

La satisfaction des sénateurs antillais

Frédéric Buval, sénateur de Martinique, a réagi favorablement au vote du texte :

Il était temps. Tous les territoires ultramarins, l'Hexagone, la France entière, étaient submergés par le trafic de stupéfiants. Ce trafic qui empoisonne notre jeunesse, qui engendre de la violence, qui engendre une circulation d'armes. Il était temps que le Parlement, et notamment le Sénat, puisse voter une loi pour faire comprendre aux trafiquants qu'il y a en France des élus qui se mettent debout maintenant pour stopper cette diffusion de la drogue dans notre jeunesse

Si les Outre-mer ne sont pas spécifiquement mentionnés dans la loi, Solange Nadille, sénatrice de la Guadeloupe, s'est aussi félicitée de son adoption par les Sénat

Cette proposition de loi intervient à un moment donné où il fallait que nous, élus, nous soyons au-delà des clivages politiques, que nous soyons ensemble pour refuser cette augmentation de trafic qui impacte toute la France. C'est pour ça qu'il y a un vote unanime cet après-midi au Sénat. Tous les sénateurs sont d'accord pour dire sur tous les territoires, il y a des problèmes. Alors moi, sur le côté ultramarin et la dimension archipélagique de la Guadeloupe, je regrette que ce texte ne mentionne pas cette dimension archipélagique parce que c'est une demande de moyens qui est plus importante. Je plaide pour qu'il y ait des mesures complémentaires et notamment pour le contrôle des côtes

130 millions nécessaires

La justice s'appuierait sur des services d'enquête réunis au sein d'un "état-major criminalité organisée" (EMCO), présenté par le ministère de l'Intérieur comme le futur "bras armé" de la lutte contre la criminalité organisée et plus spécifiquement le trafic de drogue.

Gérald Darmanin a chiffré les besoins financiers de la réforme à 130 millions d'euros pour 2026, un budget qu'il a jugé "à la portée des arbitrages ministériels".

De nombreux outils d'enquête et de répression figurent dans le texte des sénateurs: fermeture administrative de commerces soupçonnés d'agir comme des "blanchisseuses", procédure "d'injonction pour richesse inexpliquée" pour obliger les suspects à s'expliquer sur leur train de vie, gel judiciaire et administratif des avoirs des narcotrafiquants...

Soutenu par tous les bancs, chose rare au Parlement sur les sujets régaliens, la proposition de loi émanait des conclusions d'une commission d'enquête sénatoriale au long cours.

"Ce travail transpartisan nous a semblé naturel et indispensable" parce qu'il fallait "avancer vite et fort" pour "combattre les criminels de toutes nos forces", s'est satisfait le socialiste Jérôme Durain.

Malgré son soutien global, une partie de la gauche a tout de même regretté certains manques dans ce texte.

"Nous regrettons donc que rien n'apparaisse dans le texte sur le volet prévention, sur l'urgence d'en faire une grande cause nationale à l'attention des consommateurs", a pointé l'écologiste Guy Benarroche, saluant néanmoins un texte qui va "enfin diriger la lutte contre le narcotrafic que vers les criminels du haut du spectre".

"Pour donner du poids à ce texte, il fallait effectivement exclure un certain nombre de sujets qui auraient pu nous éloigner les uns des autres", s'est justifiée la présidente LR de la commission des Lois, Muriel Jourda.


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