Guyane : l’Etat assigné en justice pour « carences fautives » dans la lutte contre l’orpaillage illégal
Six associations ont saisi le tribunal administratif de Cayenne. Elles dénoncent des « carences fautives » dans la lutte contre l'exploitation illégale de l'or en Guyane. Explications.
Six associations ont annoncé hier (mercredi 17 janvier) avoir déposé devant le tribunal administratif de Cayenne un recours contre l'Etat pour dénoncer ses "carences fautives" dans la lutte contre l'exploitation illégale de l'or en Guyane, un fléau aux impacts environnementaux, sanitaires et sociaux désastreux.
Wild Legal, avec la Coopération des organisations des peuples autochtones, la CEPA de Guyane, Guyane solidarité, l'Association des victimes du mercure du Haut Maroni, Maiouri nature Guyane et la Jeunesse autochtone de Guyane sont les 6 associations qui portent ce recours devant l’Etat français.
Elles espèrent obtenir la reconnaissance des préjudices environnementaux et sanitaires de l'orpaillage illégal et l'indemnisation de ses victimes.
Principalement originaires du Suriname et du Brésil voisins, les chercheurs d'or clandestins seraient entre 6.000 et 8.000, répartis sur 300 chantiers illégaux et 100 sites primaires, selon la préfecture de Guyane, qui estime que 10 tonnes d'or sont extraites illégalement chaque année contre une tonne pour la filière légale.
Des chantiers rentables malgré la pression de l'armée
Pour extirper le précieux minerai, les orpailleurs rasent des centaines d'hectares de forêt par an et utilisent des lances à eau à haute pression qui ravagent les sols et génèrent des quantités importantes de boue polluantes - 7000 tonnes par jour d'après Wild Legal - .
L'utilisation massive du mercure, interdit en France depuis 2006, empoisonne en outre sols, rivières et humains, via la chaîne alimentaire. 13 tonnes de ce métal lourd responsable notamment de troubles neurologiques seraient rejetées chaque année dans le milieu naturel.
La préfecture de Guyane, estime déployer « des moyens considérables » pour lutter contre l'orpaillage illégal et se dit « pleinement engagée dans la lutte depuis le début des années 2000 »
En 2022, les autorités ont mené plus de 1 000 patrouilles et saisi 59 kg de mercure et 5 kg d'or, toujours selon la préfecture.
Les autorités misent sur la destruction des moyens de production des orpailleurs mais le prix du gramme d'or, passé de 30 euros en 2019 à 60 euros aujourd'hui, et la facilité avec laquelle ils se réapprovisionnent en matériel auprès de comptoirs de la rive surinamaise du fleuve frontalier Maroni rendent les chantiers rentables malgré la pression de l'armée.