Une nouvelle étude sur le tissu économique ultramarin renverse quelques idées reçues
Doit-on revoir les réalités guadeloupéennes pour la relance économique ? La question se pose après la publication d'une nouvelle étude commandée par la Compagnie nationale des Commissaires aux comptes et réalisée par le cabinet Prime View. Un document qui tord le cou à certaines idées reçues et identifie des problématiques spécifiques à chaque département.
On apprend notamment dans ce document que les flux migratoires, la fuite des cerveaux, le recul démographique ou encore le niveau d'inflation de nos départements sont similaires à des zones aux mêmes caractéristiques dans l'hexagone. Car pour mieux illustrer nos particularités, Prime View a décidé de comparer les Outre-mers avec des départements hexagonaux qui présentent un profil similaire.
Compte-tenu du recul démographique, la Guadeloupe et la Martinique s'inscrivent dans la liste des départements déclinants, avec une particularité, un vieillissement de la population un peu plus marqué chez nous.
Une fuite des cerveaux pas plus marquée
En revanche pour ce qui est de l'exode migratoire et de la fuite des cerveaux locaux, l'une des idées souvent mise en avant pour expliquer nos difficultés, l'étude pointe que les Antilles sont bien moins impactés sur ce point que les autres départements similaires. "Le pourcentage de personnes ayant quitté leur territoire de naissance se situe entre 15 % et 20 % en deçà des moyennes constatées pour les groupes de départements comparables", précise notamment le cabinet.
Mais, à l'inverse, il y a nettement moins de natifs hauts diplômés ici que dans les zones comparées au niveau national. Qui dit niveau d'étude plus faible, dit moins d'emplois qualifiés, donc moins de hauts revenus qui réinvestissent notamment dans les services, créateur d'emplois moins qualifiés. Un handicap majeur pour le dynamisme de nos îles, à en croire cette étude, même s'il est en partie compensé par l'immigration.
Parmi les autres constats que renverse ce travail d'analyse, on retrouve l'éloignement puisqu'en termes de temps de trajet, les liaisons entre nos îles et l'hexagone sont souvent similaires à celles entre des zones provinciales et Paris, comme la Lozère, l'Ariège ou le Cantal, même si les voyages transatlantiques sont évidemment bien plus compliqués au niveau logistique et économique. Par ailleurs, au sujet des prix, s'ils sont incontestablement plus élevés en Outre-Mer, le document note que l'inflation est en revanche assez similaire.
Une économie à structurer
L'autre grand constat de cette étude est que le tissu économique est globalement beaucoup plus vulnérable sous nos latitudes. Aux Antilles, ce sont la construction, le commerce et le secteur public qui englobent la majorité des actifs, avec malheureusement une atrophie des domaines agricoles et industriels.
Par ailleurs, la grande majorité des entreprises sont de très petites structures avec souvent zéro salarié, ce qui renforce la précarité de nos économies. Ajoutons à cela un taux de chômage nettement plus élevé qu'au niveau national qui va de paire avec une estimation "stratosphérique" de l'activité informelle, donc non-déclarée. La Guadeloupe serait même en tête avec entre 23 et 26,5% des emplois du département concernés par ce phénomène. C'est colossal et cela représente également une perte fiscale majeure pour les pouvoirs publics.
Des données qui démontrent la fragilité de ce tissu productif qu'on retrouve dans les irrégularités constatées par les commissaires aux comptes, nettement plus élevées que dans les autres départements. À titre d'illustration, les entreprises ultramarines pèsent pour 6 % des « certifications avec réserves » et 4 % des "impossibilités de certifier" au niveau national alors qu'elle ne représentent que 2 % des audits.
L'étude entend donc fournir des pistes aux pouvoirs publics pour adapter leurs actions à ces réalités et ainsi mieux accompagner les entreprises pour structurer une économie qui en a grandement besoin.