Une grande figure politique des Outre-mer, le Réunionnais Paul Vergès a tiré sa révérence

Par 12/11/2016 - 22:27 • Mis à jour le 18/06/2019 - 15:18

C'est une grande figure politique réunionnaise, et plus largement des Outre-mer, qui s'en est allée dans la nuit du vendredi 11 au samedi 12 novembre 2016. Le sénateur et ancien président de la Région est décédé à l'âge de 91 ans dans l'île de la Réunion où il était hospitalisé depuis fin octobre.

    Une grande figure politique des Outre-mer, le Réunionnais Paul Vergès a tiré sa révérence
Paul Vergès est mort. C'est par un communiqué de son fils Pierre que son décès a été rendu public. On savait sa santé déclinante depuis la fin de l'été dernier. Le fondateur du Parti Communiste Réunionnais (PCR) s'est éteint "au CHU de Bellepierre où il était hospitalisé" depuis le 25 octobre 2016.

"Sa famille, en concertation avec son Parti prendront des dispositions pour que tous les Réunionnais qui le souhaitent puissent se recueillir et lui rendre hommage". Mais au-delà de la Réunion, c'est une grande figure politique des Outre-mer qui disparait.

Paul Vergès a vu le jour le 5 mars 1925 à Ubon (Thaïlande). Combattant de la France libre à 17 ans, militant anticolonialiste dans les années 50, farouche adversaire du statut départemental, il avait quitté le PCF en 1959 avant de créer le PCR "pour mieux ancrer la revendication identitaire réunionnaise".

Son premier mandat politique, il l'obtient à l'âge de 30 ans comme conseiller général. En soixante ans de carrière politique, il a occupé quasiment tous les mandats politiques :

Maire de la ville du Port en 1971 ; président du Conseil Régional durant les mandatures de 1998 et de 2004 ; député de la Réunion en 1983 et en 1988 ; député européen en 2004 à la tête de "l'Alliance pour l'Outre-Mer", une liste composée essentiellement de personnalités des Outre-mer. Un siège qu'il abandonnera rapidement au profit du second de liste, la Martiniquaise Madeleine de Grandmaison. C'est l'époque où ces deux élus vont s'afficher ensemble à Saint-Denis ou à Fort-de-France et à Paris ou à Bruxelles pour orienter les politiques européennes vers les régions ultrapériphériques (RUP), le développement durable et l'autonomie énergétique de leurs territoires souvent insulaires.

Sénateur de la Réunion de 1996 à 2004, Paul Vergès avait retrouvé son siège au Palais du Luxembourg en septembre 2011. Il en était devenu le doyen d'âge et figurait dans le palmarès des élus français pour leur longévité politique.



Défenseur acharné de l'autonomie des peuples et anticolonialiste, il s'était placé dans les traces des anti-colonialistes des Antilles-Guyane à la fin des années 60 en se déclarant contre la guerre d'Algérie. Il fallut attendre 1966 pour qu'il obtienne un non-lieu suite à sa condamnation pour « atteinte à l'intégrité du territoire ».

Autonomiste assumé et non plus indépendantiste, Paul Vergès avait proposé ces dernières années, en vain, un texte de loi sur la création d'une collectivité unique et une évolution statutaire proche du statut de la Polynésie française. L'inscription dans la constitution, à l'initiative de Jean-Paul Virapoullé, son adversaire de toujours, d'une disposition rendant impossible toute consultation populaire et toute évolution institutionnelle à la Réunion (contrairement aux autres départements d'outre-mer) avait eu raison de ses velléités.

Ces dernières années, Paul Vergès avait fait du développement durable, du réchauffement climatique et de l'autonomie énergétique en milieu insulaire son dernier grand combat. Des thématiques qu'il ne manquera pas d'évoquer lors de son discours de doyen d'âge de la nouvelle mandature du Sénat (voir la vidéo plus haut). Aux côtés du conseil général de la Martinique et de l'observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, le doyen du Sénat était à l'initiative d'un colloque international organisé à Fort-de-France du 11 au 13 décembre 2006 sur "Changement climatique : la Caraïbe en danger !"

Vergès, le visionnaire...


De nombreuses réactions politiques ont suivi l'annonce de sa disparition.

Pour François Hollande, Paul Vergès était un "visionnaire"."Il a plaidé inlassablement pour une coopération régionale dans l’Océan Indien avec la volonté de donner toute sa place à la Réunion". "Il a, par sa réflexion et les politiques qu’il a conduites, contribué au développement de la Réunion", ajoute-t-il. "
Visionnaire, il inscrivait ses préconisations pour la Réunion, pour les Outre-mer et pour la France dans une analyse éclairée des évolutions démographiques, économiques et sociales du monde actuel", conclut le président de la République.

Décès de Paul Vergès : une grande figure de La Réunion s'éteint. Sa voix manquera dans le débat politique. Condoléances à sa famille.

— Manuel Valls (@manuelvalls) 12 novembre 2016
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Je salue avec beaucoup d'émotion la mémoire de Paul Vergès. Son combat pour l'égalité a changé le quotidien de tous les Réunionnais 1/2

— Ericka Bareigts (@ebareigts) 12 novembre 2016




Avec la disparition de Paul Vergès, c'est une grande voix de La Réunion et du @Senat qui s'éteint @publicsenat @afpfr

— Gérard Larcher (@gerard_larcher) 12 novembre 2016




Pour Nicolas Sarkozy, "nos divergences politiques étaient connues. Je veux toutefois dire, écrit l'ancien chef de l'Etat, mon respect pour le parcours de Paul Vergès, infatigable militant de l'idée qu'il se faisait de la liberté et de l'émancipation réunionnaises : d'abord dans la Résistance, puis dans l'engagement communiste et enfin à la tête de la Région et au Parlement".

Paul Vergès, on l'a dit, avait su établir des liens étroits avec les autres territoires d'Outre-mer. Réagissant sur RCI Martinique à la disparition de Camille Darsières il y a quelques années, Paul Vergès rendait hommage à l'élu martiniquais en des termes qui, aujourd'hui, pourraient parfaitement s'appliquer à lui.



Jean-Philippe Ludon, @jpludonrci
François Thomas, @fthomasrci