Sargasses : un phénomène causé par la modification des courants et des températures selon l’IRD 

Par 13/06/2025 - 05:00 • Mis à jour le 13/06/2025 - 08:00

Les scientifiques de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) ont récemment affiné leurs analyses sur la prolifération des sargasses. Exit l’hypothèse de la déforestation : les recherches pointent désormais un évènement climatique exceptionnel comme déclencheur.

    Sargasses : un phénomène causé par la modification des courants et des températures selon l’IRD 
Sargasses au Robert @Isabelle Hamot

Entre 2015 et 2020, de nombreuses études avaient mis en cause la déforestation des bassins de l’Amazone et de l’Orénoque pour expliquer la prolifération des sargasses dans l’Atlantique. Mais cette piste a été écartée par les recherches approfondies de l’Institut de recherche pour le développement (IRD).

Nappe sargasses - Crédit : Nicolas Toussaint

Les scientifiques se sont alors penchés sur une étude américaine datant de 2020. Celle-ci suggérait un transport massif de sargasses depuis la mer des Sargasses vers l’Atlantique tropical entre 2009 et 2010, lié à une anomalie climatique. L’IRD est allé plus loin en combinant dans ses modélisations à la fois le transport des algues brunes et leur physiologie.

Résultat : les modifications des courants et des températures dans l’Atlantique à cette période sont bien à l’origine du déplacement des sargasses. Dans l’Atlantique central, ces algues ont trouvé des conditions idéales (ensoleillement, température, nutriments), ce qui a favorisé leur prolifération dans des quantités beaucoup plus importantes que dans leur mer d’origine.

Changement climatique

Julien Jouanno, océanographe spécialiste de la dynamique tropicale et directeur des recherches à l’IRD basé à Toulouse, a expliqué que :

En utilisant un modèle de sargasses que l'on développe depuis quatre, cinq ans maintenant à l'IRD, on a pu montrer qu'effectivement, cet événement climatique avait produit un transport de sargasses depuis la mer des Sargasses jusque dans l'Atlantique central. Dans l’Atlantique central, les sargasses avaient trouvé des conditions d'ensoleillement, des concentrations en nutritif et une température qui était favorable à leur prolifération dans des quantités beaucoup plus importantes que dans leur mer originelle.

Le courant nord-équatorial continue de déplacer ces masses d’algues au gré des saisons, ce qui explique des échouages massifs sur les côtes des Antilles. L’épisode de l’oscillation nord-atlantique de 2009-2010, responsable de cette situation, reste un phénomène exceptionnel selon l’IRD : du jamais vu en un siècle de mesures.

Des recherches pour mieux anticiper

Les scientifiques poursuivent leurs travaux sur les sargasses et leur sensibilité aux changements de température, avec l’objectif de développer des prévisions à 10 ou 50 ans selon Julien Jouanno.

On continue ces recherches autour des sargasses pour essayer de mieux comprendre la sensibilité de ces algues, notamment à la température, pour essayer également de développer des prévisions à plus long terme, à l'échelle de 10 ans, 50 ans, pour essayer de comprendre si d'autres régions ne pourraient pas être affectées par ce problème. Je pense qu'il est important de mentionner qu'aujourd'hui, il n'y a aucune indication qu'il puisse y avoir un retour en arrière du phénomène dans les années à venir pour la zone antillaise.

Selon les scientifiques de l’IRD, rien n’indique un recul du phénomène à court terme aux Antilles. Cette année, un échouage record est redouté sur les côtes.


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