Nomination de Manuel Valls : le ministère rassure, le ministre laisse perplexe
Ce lundi 23 décembre, Manuel Valls a été nommé ministre d’État aux Outre-Mer au sein du gouvernement de François Bayrou. Outre l’étonnant retour aux affaires de l’ancien Premier ministre Manuel Valls, ce choix pour les Outre-mer est loin de convaincre les élus antillais.
La passation de pouvoir entre François-Noël Buffet, ancien ministre délégué en charge des Outre-mer et rattaché pour le Premier ministre et Manuel Valls, nouveau ministre d’État aux Outre-mer qui prend les rênes d’un ministère de plein exercice a eu lieu ce mardi matin (24 décembre). Une surprise du réveillon qui est loin de faire l’unanimité du côté des élus ultramarins, aux Antilles.
« Le signal est post-colonial »
Même si globalement, tous saluent le choix de consacrer un ministère aux Outre-mer en proie à diverses crises sociétales, économiques, institutionnelles et climatiques, le choix du dirigeant de ce ministère ne convainc pas.
Olivier Serva, député de la 1re circonscription de Guadeloupe :
On peut considérer que c'est un peu le retour des morts-vivants en politique. Manuel Valls, ce n'est pas un poids lourd en politique, c'est un poids mort. Ça fait bien longtemps qu'il n'existe plus, qu'il a quitté la gauche pour aller à la droite, qu'il s'est fourvoyé à Barcelone en ayant perdu, qu'il a perdu les élections législatives des Français de l'étranger. Bref, ça n'est pas bon signal. La deuxième bêtise, je dirais, c'est que les Outre-mer doivent être incarnées. Lorsqu’on ne prend pas un homme ou une femme des Outre-mer pour gérer les Outre-mer, le signal est post-colonial et il est détestable. C'est-à-dire que, pas un homme, pas une femme en Outre-mer n’est capable de gérer les Outre-mer.
Pour le membre du groupe LIOT, ce rôle accepté par Manuel Valls sert juste sa carrière ne politique.
On donne ça à quelqu'un qui, à mon avis, n'a pas une appétence forcément pour les Outre-mer, mais plutôt une appétence pour sa carrière personnelle.
« La balle est dans notre camp »
Cette arrivée à la tête du ministère de la rue Oudinot ne suscite pas nécessairement d’espoirs particuliers pour la sénatrice de Martinique, Catherine Conconne :
Je ne crois pas aux hommes et aux femmes providentiels, je crois avant tout à un peuple qui doit plus que jamais montrer son niveau extrême de maturité, être dans la construction, être prêt quand les grands enjeux arrivent. Et pour pouvoir faire face à n'importe quel homme de pouvoir de l'autre côté de l'Atlantique. On voit bien qu'il y a déjà eu 8 ministres de l'outre-mer. J'ai presque envie de dire au suivant, parce que ça ne va pas manquer, à mon avis, vu l'ambiance au niveau national, mais la balle est dans notre camp. Qu'est-ce que nous on dit, qu'est-ce que nous on veut exactement, quelle est notre maturité à faire peuple et aller sur les questions essentielles et à réclamer pour nous ce qu'il y a de meilleur.
« Un ministre volontariste »
Du côté du Parti socialiste, en Martinique comme en Guadeloupe, on annonce également du changement avec une censure annoncé à demi-mot.
Dans un communiqué co-signé, le premier secrétaire fédéral de Guadeloupe, Olivier Nicolas, et la première secrétaire fédérale de Martinique, Béatrice Bellay, du Parti socialiste écrivent :
Au regard des urgences, il ne bénéficiera ni de round d’observation ni d’état de grâce. Mais il pourrait surtout devoir faire face à des élus et à des populations désabusées et, pire, convaincues que les mêmes causes produisant les mêmes effets, une nouvelle censure abrégera la durée de vie de ce gouvernement Barnier 2 dirigé par François Baryou…
Seul Victorin Lurel, sénateur de Guadeloupe, sort du lot et place quelque peu d’espoir dans la nomination de celui qu’il avait soutenu lors des primaires de gauche en 2017.
Compte tenu des défis, des enjeux et des mutations à l’oeuvre, les Outre-mer méritent un ministre d’expérience et volontariste. J’ose espérer, qu’en tant qu’ancien Premier ministre, M. Valls saura trouver les voies de l’apaisement en Nouvelle-Calédonie, celles d’une assistance accrue et d’une reconstruction durable à Mayotte et la force d’imposer, enfin, une feuille de route ambitieuse pour l’ensemble des territoires des Outre-mer. Dans la concertation et dans l’écoute, M. Valls doit pouvoir s’affranchir des inclinaisons à la fois sécuritaires et austéritaires de ses collègues ministres pour engager des réformes outre-mer qui peuvent encore être transpartisanes…
Le député martiniquais Jiovanny William explique, lui, quelles sont ses attentes vis-à-vis de Manuel Valls, « pour qu'il puisse, avec nous, démontrer, que nos territoires ne sont pas une remorque mais une locomotive pour toute la France ».