Borne veut résoudre le problème du manque de filles dans les sciences
La ministre de l'Éducation Nationale veut miser sur des pôles d'excellence afin de rétablir la parité dans les filières scientifiques et mathématiques.

Lutter contre les biais de genre à l'école, susciter des vocations et renforcer la place des filles dans les formations en mathématiques: Elisabeth Borne lance un plan pour lutter contre le manque de femmes dans les sciences.
Le déséquilibre en faveur des garçons dans les formations aux métiers d’ingénieurs et du numérique "prive les filles de débouchés vers des carrières souvent mieux rémunérées" mais aussi "freine la capacité de l’État à former suffisamment d’ingénieurs", jugent les services du ministère.
"On ne veut pas moins de garçons. On veut juste plus de filles", a insisté mercredi la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, devant une classe de seconde labellisée "pôle excellence de mathématiques" au lycée Paul Labie de Courbevoie, près de Paris, pour présenter son plan.
Un pôle excellence de mathématiques
Cette classe sélective qui offre deux heures de maths en plus par semaine comparé à une classe normale ne comptait que cinq filles à son ouverture en 2017 et se trouve aujourd'hui à quasi parité.
"Il y a du travail derrière", a insisté l'enseignante de mathématiques Touria Sahbani, qui se rend régulièrement dans les collèges faire la promotion de ce programme.
Le plan "filles et maths" de la ministre comprend huit piliers, dont le premier est de "former et sensibiliser" aux biais de genre et aux stéréotypes tous les professeurs dès la rentrée 2025, du primaire au lycée.
Le décrochage des filles par rapport aux garçons en maths commence dès le CP. Cet écart de genre en sciences et l'un des plus forts de l'UE selon les études internationales.
L'ex-Première ministre, elle-même polytechnicienne, a assuré sur France Inter que "les filles ont moins confiance en elles (...). Si on n'est pas attentif à ça, on interroge tout le temps les garçons et pas les filles".
"Quand on regarde les appréciations, les filles, on leur dit qu'elles sont consciencieuses et les garçons qu'ils sont brillants", regrette Mme Borne.
Lors de sa visite dans la classe du lycée Paul Labie, les jeunes filles ont défilé avec assurance au tableau pour présenter les activités de leur classe, dont un projet pour dénombrer le genre des noms de rues de plusieurs grandes villes européennes: un tiers seulement de noms de femmes à Barcelone, environ un sur dix à Paris...
Classes aménagées
Le plan "filles et maths" prévoit aussi l'expérimentation de classes scientifiques à horaires aménagés en 4e et 3e, avec un objectif de 50% de filles dans chacune.
"On va expérimenter dans cinq académies dès la rentrée" avant d'étendre le dispositif à la rentrée suivante, a promis Mme Borne.
Quant au bac, l'objectif global est que 30.000 filles de plus en 2030 choisissent la spécialité mathématiques en première et la conservent en terminale, soit 5.000 filles de plus par an dès la rentrée 2025.
Aujourd’hui, 42% des filles suivent l'enseignement de cette spécialité en terminale, mais elles ne sont plus que 25% des étudiants qui intègrent des formations supérieures conduisant aux métiers d’ingénieurs et du numérique. Une proportion qui "stagne depuis 20 ans", précise le ministère.
Le plan prévoit par ailleurs un "objectif" - Mme Borne évite le terme quotas - d'au moins 20% de filles dans chaque classe préparatoire scientifique en 2026 et 30% en 2030.
Tout en louant l'effort "indispensable" pour s'attaquer à ce problème, Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat Snes-FSU, qualifie auprès de l'AFP certaines mesures annoncées de "recyclage". "Combien de fois a-t-on eu des plans maths, des plans de formations de professeurs...?"
Le gouvernement avait déjà prévu l'instauration d'une épreuve de mathématiques anticipée en classe de première pour la prochaine année scolaire pour tenter de renforcer le niveau au lycée.
La réintroduction d'un enseignement des mathématiques obligatoire à la rentrée 2023 pour tous les lycéens de la filière générale en première avait déjà soldé l'une des mesures les plus controversées de la réforme Blanquer du bac.
La présidente d'honneur de l'association "Femmes et mathématiques" Véronique Slovacek-Chauveau trouve le plan "très bien fait" notamment sur la formation des maîtres. Elle note que la place des filles n'était pas présente dans les plans "maths" précédents comme le plan Villani-Torossian.
Interrogée par l'AFP, elle appelle à travailler aussi sur les appellations comme la spécialité "maths expertes" dont l'intitulé peut, selon elle, intimider.
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