Chlordécone : deux plaintes d'associations jugées irrecevables
La Cour de justice de la République (CJR) a déclaré irrecevables les plaintes déposées par deux associations contre d'anciens ministres dans le dossier de l'utilisation du chlordécone aux Antilles,
La juridiction a conclu fin janvier que l'Association médicale de sauvegarde de l'environnement et de la santé (Amses) et l'Association guadeloupéenne d'action contre le chlordécone (AGAC), affiliée au syndicat UGTG, ne remplissaient pas les critères pour pouvoir déposer plainte et n'avaient pas d'"intérêt à agir".
La CJR, seule juridiction habilitée à juger les actes des membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions, n'a donc pas examiné le fond du dossier et ne s'est pas prononcée sur les faits dénoncés au printemps 2021 par les plaignants.
L'Amses - qui compte 25 médecins exerçant en Martinique ou retraités - visait les anciens ministres de la Santé ou de l'Agriculture Xavier Bertrand, Marisol Touraine, Dominique Bussereau, Louis Mermaz et Jean-Pierre Soisson. Ainsi que l'UGTG, Agnès Buzyn et Didier Guillaume.
Les avocats de l'Amses reprochaient aux anciens membres du gouvernement d'avoir "prolongé l'autorisation d'utilisation du chlordécone" et signé des arrêtés, notamment en 2005, qui autorisaient des résidus de chlordécone dans l'alimentation avec des seuils tolérables" d'après eux bien trop élevés.
Depuis 2008, le pôle santé publique du tribunal judiciaire de Paris est chargé d'une information judiciaire, mais les juges d'instruction ont fait part en 2021 à plusieurs parties civiles de leur analyse selon laquelle les faits seraient dans leur grande majorité prescrits.
Dans le cadre de cette enquête, les ex-ministres de l'Agriculture Jean-Pierre Soisson (1992-1993) et Louis Mermaz (1990-1992) ont été entendus comme témoins les 24 juin et 22 juillet derniers.
En 2006, plusieurs associations martiniquaises et guadeloupéenne avaient déposé trois plaintes pour empoisonnement, mise en danger de la vie d'autrui et administration de substance nuisible.
Le chlordécone, un pesticide interdit en France en 1990 mais qui a continué à être autorisé dans les champs de bananes de Martinique et de Guadeloupe par dérogation ministérielle jusqu'en 1993, a provoqué une pollution importante et durable des deux îles.
Plus de 90% de la population adulte en Guadeloupe et Martinique est contaminée par le chlordécone, selon Santé publique France, et les populations antillaises présentent un taux d'incidence du cancer de la prostate parmi les plus élevés au monde.