Enfermé pendant des années à Trinité : « s’il y avait eu un suivi, ce ne serait pas arrivé »
Après la découverte d’une situation terrible au quartier Plaisable, une ancienne assistante maternelle témoigne. Elle a connu Willy, l’homme de 40 ans autiste décédé dimanche dernier (22 décembre) au domicile de sa maman, lorsqu’il avait entre 6 ans et 18 ans.

Pour beaucoup, c'est l'effroi depuis la révélation des faits. Même si, au sein du quartier, les riverains rencontrés semblaient savoir que « l’enfant », comme ils l’appellent, était « enfermé » dans des conditions terribles, dans cette maison située sur les hauteurs de Trinité.
Mais Willy, qu’ils n’avaient plus vu depuis des années, avait, en réalité, aujourd’hui 40 ans. Il est décédé dimanche dernier au domicile de sa maman, une femme qualifiée de « discrète » et à la situation familiale complexe.
RCI a joint une assistance familiale qui connaît bien ce dossier et le cas de cet enfant.
À l'époque, j'étais assistante maternelle. Je travaillais pour l'ASE (Aide Sociale à l’Enfance) et il était placé. À l'âge de 6 ans, jusqu'à ses 18 ans où on l'a remis à sa maman. Je le voyais tout le temps. On effectuait des sorties.
L'enfant était suivi par Martinique Autisme, par Colson à l'époque. Parce que l'enfant, c'est vrai qu'il était, comme on dit chez nous, « sireur ». Il fallait le surveiller tout le temps. Quand il était dans la maison, à peine le dos tourné, il se rendait dans la rue. S'il avait vu un crapaud, à terre, il mangeait le crapaud.
La dame chez qui l'enfant était appelait la maman. Elle demandait à la maman pour lui, "comment va Willy?". Elle lui répondait : « il va très bien, ça va, et tout. Mais, pendant ce temps, c’était un mensonge.
Pour cette ancienne assistante maternelle, il faut, aujourd’hui, « demander des comptes à l’Etat ! ».
Vous avez enlevé l'enfant d'une famille d'accueil qui s'occupait très bien de lui, vous l'avez donné et déposé chez la maman. Où était le suivi ? S'il y avait eu un suivi, ça ne serait pas arrivé.
« Dès l'âge de la majorité, on lâche les enfants »
Assistante familiale depuis 32 ans, elle regrette, outre le cas particulier de Willy, un certain laxisme dans la prise en charge des enfants en difficulté.
La plupart du temps, dès que les enfants ont l'âge de la majorité, on les lâche, on les enlève de chez la famille d’accueil et puis on les lâche dans la nature. Je trouve que ce n'est pas bien. Donnez-lui quelque chose. Apprenez à l'enfant à se débrouiller, à faire des choses !
Après la découverte du cadavre dans un endroit qualifié de « cachot », la mère de famille a été placée en garde à vue en début de semaine.
Âgée de 80 ans, elle a été mise en examen, à ce stade, pour « séquestration ayant entraîné la mort ». Le juge des libertés et de la détention l’a placée sous contrôle judiciaire.
Les résultats de l’autopsie, qui ne sont pas encore connus, doivent permettre de déterminer les causes du décès. Et s’il y a, ou non, un lien avec les faits présumés de « séquestration ».
Des versions qui divergent
Alors que l’enquête débute seulement, des voix divergentes se font néanmoins entendre.
Elles nuancent, notamment, la question des dates et le nombre d’années où Willy se serait retrouvé enfermé au domicile de sa mère.
Selon l’assistante familiale, l’homme placé en famille d’accueil jusqu’à ses 18 ans aurait, en réalité, de nouveau été confié à sa maman en 2002, et non en 1992, comme le laissaient penser les premiers éléments de l’enquête.
Une version que corrobore l’une des sœurs du défunt. Cette dernière affirme d’ailleurs que son frère n’a jamais été séquestré par leur mère. Et qu’il sortait pour voir de la famille.
Les investigations se poursuivent sous la coupe d’un juge d’instruction pour déterminer dans quelles conditions le quadragénaire était retenu au domicile de sa mère, dans cette affaire, symptomatique d'une certaine misère sociale.
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