Emmanuel Macron élargit la gratuité du préservatif au moins de 18 ans

Par 09/12/2022 - 17:02

Le préservatif sera gratuit en pharmacie à partir de janvier pour les 18-25 ans et les mineurs: est-ce une "petite révolution de prévention" des infections sexuellement transmissibles comme le dit Emmanuel Macron? Faut-il aller plus loin?

    Emmanuel Macron élargit la gratuité du préservatif au moins de 18 ans

Qu'a dit Emmanuel Macron, et pourquoi cette annonce surprise?

"En pharmacie, le préservatif sera gratuit pour les 18-25 ans. Cela va commencer dès le 1er janvier. C'est une petite révolution de prévention", a lancé le président de la République jeudi lors d'une session du Conseil national de la refondation (CNR) consacrée à la santé des jeunes, à Fontaine-le-Comte (Vienne). Vendredi soir, dans une courte vidéo, Emmanuel Macron a élargi cette mesure aux mineurs. "Banco, nous allons le faire!", a-t-il dit.

Si les modalités de cette prise en charge restent à préciser, le ministre de la Santé, François Braun, a assuré vendredi que "ça va être très simple: un remboursement à 100% par la Sécurité sociale", "sans ordonnance".

"Un des enjeux majeurs est la santé des jeunes" dans un contexte de "reprise des infections sexuellement transmissibles (IST), qui sont une grande cause d'infertilité", a fait valoir le ministre sur BFMTV et RMC.

Ces dernières années, le nombre de nouveaux diagnostics d'infection au VIH n'a pas baissé en France, stagnant autour de 5.000 en 2021. En outre, selon Santé publique France, 15% des personnes ayant découvert leur séropositivité en 2021 étaient âgées de moins de 25 ans, et la part de cette classe d'âge ne baisse pas depuis 2017.

Quelle prise en charge jusque-là?

Des préservatifs masculins sont déjà remboursés par la Sécurité sociale, sans limite d'âge, mais sur prescription obligatoire d'un médecin ou d'une sage-femme. Deux modèles sont concernés: "Eden" depuis décembre 2018, auquel est venu s'ajouter "Sortez couverts!" en mars 2019.

Selon les données de l'Assurance maladie, 542.893 boîtes (de 6, 12 ou 24 préservatifs) ont été remboursées en 2021, un chiffre en hausse de 31% sur un an.

Ce dispositif est cependant méconnu: seuls 21% des mineurs et 29% des 18-24 ans en ont entendu parler, a indiqué jeudi l'Elysée.

"Cette possibilité d'accès gratuite sur prescription a constitué un premier pas, mais nous savions que le passage par un médecin généraliste pouvait représenter un obstacle", indique à l'AFP Florence Thune, directrice générale de l'association de lutte contre le VIH Sidaction.

Le passage au "sans ordonnance" ne devrait pas poser de difficultés. "Le produit existe, on a un tarif réglementé et toutes les facilités pour faire du tiers-payant en pharmacie", explique Philippe Besset, président de la FSPF, premier syndicat des officines. Ce pharmacien a une "seule inquiétude": le niveau des stocks. Et "un espoir": que l'accès à ces préservatifs masculins concerne aussi les jeunes femmes, "c'est important en termes de prévention".

Pourquoi avoir élargi cette mesure aux moins de 18 ans?

Si les acteurs (associations, médecins) engagés dans la prévention des IST avaient salué l'annonce présidentielle de jeudi, plusieurs s'étaient interrogés sur la fourchette d'âge. "Pourquoi pas avant 18 ans? Nous savons que la vie sexuelle débute souvent avant cet âge", relevait l'association AIDES.

Une remarque entendue par Emmanuel Macron, qui a annoncé l'extension de cette mesure aux moins de 18 ans. "On va faire travailler les équipes pour pouvoir étendre cette mesure aux mineurs (...) Je pense que c'est une très bonne politique de prévention pour permettre à tous les jeunes de se protéger", ajoute-t-il.

Les mineurs sont déjà parmi les principaux bénéficiaires des quelque 5 à 6 millions de préservatifs distribués gratuitement chaque année, que ce soit dans les points accueil et écoute jeunes, à l'infirmerie des collèges et lycées, dans les centres d'animation ou les MJC, etc. A elle seule, l'association AIDES en donne plus d'un million par an.

Faut-il aller plus loin ?

Pour AIDES, la stratégie du "tout préservatif" n'est pas "suffisante". Selon cette association, "il faut aussi rendre disponibles les autres outils de prévention, notamment la PrEP (prophylaxie pré-exposition)", qui consiste à prendre un médicament afin d'éviter de se contaminer et reste "peu connue chez les moins de 25 ans". Florence Thune partage cet avis: pour elle, les autorités sanitaires ne parlent "pas suffisamment" de la PrEP.

Quant au préservatif féminin, qui n'est pas pris en charge par la Sécu malgré une recommandation en ce sens du Haut conseil à l'Egalité en 2021, "il faudrait là aussi un effort d'information et de mise à disposition", estime la dirigeante du Sidaction.