Le glyphosate autorisé pour 10 ans de plus : « cela reste un produit dangereux »
C’est officiel, ce 16 novembre, l’utilisation du glyphosate est de nouveau autorisée encore pour 10 ans dans les pays de l’Union européenne. Une décision qui a également des répercussions chez nous. Une étude menée par l’association « Générations futures » révélait que la Guadeloupe était en 2018 un très gros consommateur de ce pesticide, le 6e département de France, précédé par la Martinique, logée à la 3e position de ce triste classement.
C’est une promesse d’Emmanuel Macron qui vient d’être enterrée : la Commission européenne a renouvelé aujourd’hui l’autorisation du glyphosate pour une durée de 10 ans. Une décision qui fait suite à l’absence de majorité entre les États membres de l’Union à voter en sa défaveur, la France s’étant abstenue.
Une très mauvaise nouvelle pour de nombreux spécialistes qui tiennent à mettre en garde la population sur les effets dévastateurs de ce pesticide combiné à d’autres herbicides chez nous. Comme le président de l’association VIVRE, Dr Jean-Marie Flower, également écologue :
On ne peut pas dire qu'on est surpris. Les lobbies de l'industrie chimique sont très forts, tout comme ceux de l'industrie pétrochimique et pétrolière. C'est vrai qu'il a procuré un certain nombre d'avantages à court terme aux agriculteurs et aux particuliers, parce qu'il y a beaucoup de particuliers qui l'utilisent, mais ça reste un produit dangereux. Ça reste un produit qui ne tue pas que les herbes.
Selon l’écologue, ce maintien augmente les risques chez nous avec une baisse de la fertilité déjà observée depuis 50 ans chez les hommes et les femmes. « Les problèmes de développement chez les jeunes enfants, ça va également continuer. Ça n'est probablement pas uniquement à cause du glyphosate. Il y a tout un effet cocktail entre plusieurs composés dont il faudrait réduire l'usage », poursuit-il.
932 tonnes de glyphosate importées en Guadeloupe
À ce jour il est difficile de déterminer si la Guadeloupe demeure toujours dans le top six des départements français qui consomment le plus de glyphosate en 2023. Le pesticide le plus utilisé dans le monde aurait été abandonné dans les champs de bananeraie, selon la CGTG, après les scandales consécutifs de l'épandage aérien et celui du chlordécone, mais il demeure encore bien actif.
En 2020, 932 tonnes de glyphosate étaient importées en Guadeloupe, selon l'association Générations Futures. Autant de litres d'herbicide qui forment une synergie de pesticides avec une autre molécule bien connue chez nous, explique le président de l'association VIVRE, Jean-Marie Flower.
Ça a été montré par des études scientifiques. Le fait d'utiliser du glyphosate en Guadeloupe et Martinique, en favorisant l'érosion des sols après les fortes pluies, ça a favorisé le transfert du chlordécone qui était dans les sols vers le milieu aquatique où il n'y avait pas de chlordécone.
Peu de réactions au niveau local
La France et par conséquent les Antilles en sont encore là. Faute de solutions alternatives pour remplacer le fameux herbicide, indispensable encore à de nombreux agriculteurs pour le rendement de leur culture. Mais pour l'écologue, l'argument ne tient pas :
Si nos systèmes agricoles étaient beaucoup plus diversifiés et beaucoup plus ressemblants aux écosystèmes naturels, on aurait finalement une régulation interne. Et finalement, les mauvaises herbes, on n'aurait pas besoin de les retirer puisqu'elles ne pourraient pas s'installer, puisqu'il n'y aurait pas assez de lumière pour elles. Si on couvrait le sol avec plusieurs cultures et notamment 12 mois sur 12.
Du côté de la classe politique locale, peu de voix se sont fait entendre sur ce dossier, excepté celle de la Fédération du Parti socialiste de Guadeloupe, pour qui cette décision est une conséquence directe du déni de justice dans le dossier du Chlordécone.