Deux pharmacies liquidées après des transferts contestés
Face à une population en baisse, les pharmaciens de Martinique sont plus que jamais enclins à protéger leur clientèle, quitte à parfois saisir la justice. Ces deux dernières années, deux officines en ont fait les frais, avec au terme des procédures, la liquidation de la structure.
La pharmacie Bravo (Douglas Bravo est l'ancien président du syndicat des pharmaciens) située à la frontière entre Place d'Armes et Bois Carré au Lamentin et la pharmacie La Bonne Santé située à proximité du pont de Californie ont été liquidées par le tribunal de commerce de Fort-de-France au cours des deux derniers mois.
Deux décisions qui interviennent après des refus de transfert des officines par le tribunal administratif parfois après des années de procédure. C'est le cas par exemple de la pharmacie La Bonne Santé qui a finalement baissé le rideau après 5 ans de conflit contre la pharmacie de Basse-Gondeau. Pour la pharmacie Bravo, ce sont deux pharmacies situées à Place d'Armes, l'une au centre commercial, l'autre à proximité du stade Georges Gratiant qui se sont opposées au transfert.
Un phénomène assez récent en Martinique à en croire les professionnels du secteur. Un secteur mis à mal par la baisse de population en Martinique. Une donnée démographique qui pousse les acteurs à défendre farouchement leur clientèle.
En effet, ce sont les pharmaciens concurrents qui contestent les transferts de leurs homologues.
Bassin de population
Il faut dire que chez nous, comme dans l'Hexagone, on observe une sur-représentation des pharmacies. Raison pour laquelle il y a environ 15 ans, la législation a augmenté les quotas nécessaires à la création d'officines , passant de 3500 habitants pour une seconde officine à 4500 habitants.
En d'autres termes, s'il y a déjà une pharmacie dans le quartier, il faut 4500 habitants de plus pour en créer une seconde (en pratique c'est environ 3000 habitants). Il s'agissait de protéger une profession, qui compte tenu de la baisse du prix des médicaments et du déplacement de la population hors des bourgs, commençait à connaître certaines difficultés.
Pas de nouvelles pharmacies
Une mesure qui a rendu impossible la création des pharmacies en France hexagonale comme en outre-mer. Une seule solution le transfert d'officine qui lui aussi est soumis à deux conditions : un bassin de population de 4500 habitants et l'intérêt du service rendu à la population.
C'est pour cette raison qu'il n'est plus possible de transférer une pharmacie dans un centre commercial. Cette dérogation a été supprimée il y a une quinzaine d'années. C'est le cas par exemple au centre commercial Génipa à Ducos, où le transfert programmé d'une pharmacie n'a pu aboutir.
Pour obtenir un transfert, un pharmacien doit solliciter l'Agence Régionale de Santé qui valide ou rejette la demande. L'autorité sanitaire interroge l'ordre des pharmaciens et le syndicat de la profession à titre consultatif. La procédure inclut également une enquête de terrain. Néanmoins, l'autorisation de transfert est susceptible de faire l'objet de recours devant le tribunal administratif.
C'est ce qui s'est produit dans le cas des officines lamentinoises. Le tribunal s'étant prononcé contre le transfert, elles ont perdu le droit de vendre des médicaments, entraînant une chute inexorable du chiffre d'affaires, jusqu'à la liquidation.
Pour aller plus loin : le reportage de Hanna Roseau