Violences sexuelles : la proposition de prolonger la garde à vue jugée insuffisante
Un délai de garde à vue étendu à 72 heures dans les affaires de violences faites aux femmes. Le nouveau ministre de la Justice, Gérald Darmanin, l’a annoncé cette semaine sur le plateau de TF1. L’initiative ne rencontre pas l’adhésion des associations féministes en Martinique, ni celle du barreau
Un délai de garde à vue étendu dans les affaires de violences faites aux femmes. Gérald Darmanin l’a annoncé jeudi (26 décembre), au journal de 20 heures sur TF1.
Le nouveau garde des Sceaux souhaite étendre le délai de garde à vue de 48 à 72 heures en cas de violences sexuelles aggravées et de féminicide.
Pour l’ex-ministre de l’Intérieur, ces nouvelles mesures favoriserait la protection des femmes et laisserait plus de temps à l’enquête de police.
« Plus de moyens financiers et humains »
Une proposition opportuniste qui ne satisfait pas George Arnaud, présidente de l’association féministe martiniquaise Culture Egalité.
Ce n'est pas ces 24 heures de plus de garde à vue qui vont changer l'ordre des choses. Ce n'est pas dans ce laps de temps si court que la victime aura le temps de rassembler les pièces manquantes. Donc ce n'est pas ça qui va nous faire sauter au plafond et crier victoire.
Ce qu’il faudrait, selon George Arnaud, c’est plus de moyens financiers et humains pour que la justice soit faite.
Il faudrait plus de magistrats et que les enquêtes soient plus rapides. Qu'il n'y ait pas de non-lieu parce qu'il manque des pièces, parce qu'on n'a pas eu le temps de faire les enquêtes. Et que le temps pour juger une affaire soit réduit. Il faut que le code pénal et le code civil soient mis en oeuvre réellement, qu'il y ait aussi une prise en charge des auteurs pour qu'il n'y ait pas de récidive. Et puis aussi qu'il n'y ait pas cette charge portée sur les victimes qui doivent prouver qu'elles n'ont pas donné de consentement et que simplement l'auteur qui a commis un crime soit jugé.
« Une opération de communication »
Un avis partagé par Me Murielle Renard-Legrand, la bâtonnière de Martinique, pour qui la justice à surtout besoin de moyens pour lutter contre le fléau des VSS (violences sexistes et sexuelles).
A mon sens, il s'agit d'un effet d'annonce et d'une opération de communication. Ce dont véritablement la justice a besoin pour lutter efficacement contre les meurtres sur conjoint et les violences sexuelles aggravées, c'est de moyens matériels et humains. Il faut véritablement doter toute la chaîne pénale, les enquêteurs, les greffiers, les magistrats. Il faut également augmenter la rétribution des avocats, qui souvent interviennent au titre de l'aide juridictionnelle pour ces victimes-là. C'est à cette condition qu'on le fera reculer ce fléau. Mais la prolongation de la garde à vue pour ces infractions-là, ça ne me paraît pas de nature véritablement à enrayer ces violences.
Des mesures « trop légères »
Sur le volet féminicide, ces mesures restent « trop légères » pour George Arnaud, présidente de l’association féministe martiniquaise Culture Egalité. Elles éludent, notamment, totalement la question de la protection des enfants.
En ce qui concerne les féminicides, nous espérons que cette garde à vue se cumulera avec l'exclusion du domicile et le retrait de l'autorité parentale pour des hommes qui ont commis des homicides et qu'on arrête de penser qu'un mec violent et assassin peut être mon père. Pour nous, ça, c'est une chose qui est très importante. Voilà tout ce que les féministes demandent. Ce n'est pas des prolongations de garde à vue qui vont changer l'ordre des choses. On souhaite surtout que ces assassins soient mis hors d’état de nuire et que les enfants soient protégés.
Enfin, pour la présidente de l’association féministe Culture Egalité, la « grande cause nationale » voulue par Emmanuel Macron ne peut être défendue par Gérald Darmanin.
Cette nomination de Darmanin au ministère de la Justice, pour les femmes, c'est une très mauvaise nouvelle. Et c'est aussi méprisant. Comment peut-on nommer au ministère de la Justice quelqu'un qui, pour nous, a effectivement commis des violences sexuelles et qu'on a blanchi ?
En janvier 2023, la cour d’appel de Paris a confirmé, le non-lieu rendu en juillet 2022 en faveur de Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, accusé de viol par Sophie Patterson-Spatz, qui avait déposé un recours contre cette décision.
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