« J’étais la première noire chez Carven », Nicaise Jean-Louis nous raconte son parcours
Nicaise Jean-Louis a été mannequin haute couture pendant 52 ans, et actrice figurante dans Le Gendarmes et les gendarmettes ou encore dans Moonraker. Cette Guadeloupéenne a eu une carrière bien remplie. Entretien.
En tant qu'actrice, vous avez laissé une empreinte en tant que James Bond Girl dans Moonraker. Vous avez également incarné Yo Macumba dans le film culte Le Gendarme et les gendarmettes avec Louis de Funès. Racontez-nous un peu tout ça.
C'est lui qui m'a choisie. J'étais mannequin haute couture, je faisais un défilé chez Carven, la première maison de couture qui habille les hôtesses déjà Air France, et puis d'autres compagnies. Et Louis de Funès voulait que ce soit Carven qui fasse les uniformes pour les gendarmettes et pour lui. Et il est venu voir la collection avec le producteur et sa femme et ils étaient assis dans le salon. Je suis arrivée sur le podium. Il s'est retourné vers Bétou, il lui a dit J'ai trouvé ma gendarmette !
Comment après ça s'est enchaîné au niveau du tournage avec les acteurs ?
Ça s'est très bien enchaîné parce que j'ai fait un essai en studio à Boulogne et ils m'ont donné le scénario. Je partais en Allemagne pour une semaine pour défiler. Il m'a donné le scénario que je devais apprendre et pour refaire un essai. Donc je suis partie. J'ai appris mon texte, je suis retournée, j'ai fait le test. L'essai au studio de Boulogne, c'était parfait, c'était dans la boîte.
« On était plié en deux, on riait même quand il n'était pas à l'écran »
Y a-t-il un souvenir de tournage qui vous a marqué ?
J'ai adoré faire connaissance avec toute l'équipe. Il y avait le producteur, les gendarmettes, les gendarmes et tout. Nous avons eu un dîner chez Sénéquier à Saint-Tropez et il était déjà un petit peu malade de Funès parce qu'il était sur le plateau avec son cardiologue et il n'avait pas droit à l'alcool et il faisait des mimiques au serveur pour qu'il lui serve de la prune dans sa tasse à café. Sa femme Jeanne lui dit ‘Mais Loulou, t'as pas le droit ! Mais non !’ Et dès qu'elle avait la tête tournée, il lui faisait des mimiques. On était plié en deux, on riait même quand il n'était pas à l'écran. Il était toujours drôle.
Alors après, vous avez ôté l'uniforme de gendarmette pour incarner l'une des filles du méchant de service Hugo Drax dans le film Moonraker avec Roger Moore, alias James Bond. Comment ça s'est passé ?
J'étais mannequin chez Courrèges. J'avais un copain qui a défilé avec moi et qui était aussi mannequin chez Courrèges. Et puis après un défilé, il me dit 'Écoute, ils n'ont pas trouvé la noire pour jouer dans un James Bond, tu vas voir Margot Capelier et puis on ne sait pas’. Toutes les filles noires étaient déjà passées pour l'essai, elles n'ont pas été retenues. Je suis passée chez Margot. Elle m'a vue, mais le metteur en scène n'était pas là. Entre-temps, j'ai fait mon casting chez Dior et j'ai été retenue. Je suis allée me couper les cheveux et je suis revenue le soir vers 16 h au studio à Boulogne. Monsieur Albert Broccoli arrive, une espèce de géant avec son gros cigare. Il arrive, il ouvre ses yeux, il enlève son cigare et il dit à Margot ‘She's beautiful !’ Et c'est comme ça. C'était un rêve debout !
52 ans de mannequinat
C’était comment de jouer ce personnage ?
Génial parce que c'était à l'époque en 78. Le mastermind, tout le décor. Quand on voit à un moment Roger Moore qui tombe dans la piscine et se fait attaquer par le serpent, c'est dans un studio de Boulogne. C'était magnifique, vraiment sublime.
Est-ce que vous avez eu d'autres opportunités cinématographiques ?
J'en ai eu, mais il fallait passer à la casserole et ce n’est pas ma pomme, ce n’est pas ma devise.
Dans le mannequinat, quelles sont les maisons de couture avec lesquelles vous avez collaboré ?
J'ai rencontré mademoiselle Carven qui m'a dit ‘Tu devrais rentrer à Paris avec moi, j'ai une maison de couture et tu seras très bien comme mannequin. Je n’ai pas besoin de t'apprendre à marcher, tu marches comme une reine’. J'ai hésité. C'était dur la vie que je menais avec trois enfants, ce n’était pas évident. Finalement, j'ai dit oui à Carven. Je suis partie. J'ai pris l'avion le 15 janvier 75. Le 25 janvier, je présentais la presse de haute couture à tous les journalistes du monde entier. Chez Carven, j'étais la première noire et la première grande chez Carven.
Combien d'années êtes-vous restée dans ce monde de la mode ?
J'ai commencé, j'avais 29 ans, j'ai fini, j'avais 59 ans. Et c'est moi qui suis partie parce que je travaillais avec des gamines qui avaient l'âge de ma fille et qui étaient très mal élevées, ça, je ne l'ai pas supporté.
Aujourd'hui, quels sont vos projets ?
Ça va être les 110 ans de Louis de Funès. La municipalité de Saint-Tropez m'a invitée au mois d’avril parce qu'il va y avoir pas mal de manifestations autour des gendarmes. Et vers le 26 avril, je suis en Bretagne aussi, justement pour une exposition au Cellier sur Louis de Funès. Le Cellier, c'est là où il avait son château que j'ai vu d'ailleurs, parce que l'année dernière, il y avait une exposition là aussi et une manifestation.
Comme disait Buzz Aldrin, il faut toujours garder espoir et ne jamais désespérer !
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