Un décret rend possible l'indemnisation des travailleurs agricoles empoisonnés par le chlordécone
Un an après la loi, le décret d'application du fonds d'indemnisation des victimes des pesticides ouvre la voie à l'indemnisation des victimes du chlordécone. Une première étape qui est encore loin d'être suffisante.
Depuis vendredi dernier, un décret permet aux victimes des pesticides de demander réparation, grâce à un fonds d'indemnisation.
Un premier espoir pour les ouvriers agricoles et leurs familles, qui depuis 30 ans, attendent réparation ici en Martinique après avoir été empoisonnés par le chlordécone.
Qui est concerné ?
Le texte concerne les demandes déposées à compter du 1er janvier 2020 ou en cours d’instruction à cette date. Ce fonds ne s'arrête pas aux seuls exploitants agricoles salariés.
La liste des publics concernés par le décret : assurés relevant de l’assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles du régime général, du régime des salariés des professions agricoles, du régime des non-salariés des professions agricoles, du régime d’assurance accidents du code local des assurances sociales en vigueur dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, les anciens exploitants, leurs conjoints et les membres de leur famille bénéficiaires d’une pension de retraite agricole qui ont cessé leur activité non salariée avant le 1er avril 2002, enfants atteints d’une pathologie résultant directement d’une exposition prénatale aux pesticides du fait de l’activité professionnelle de l’un des parents, organismes de sécurité sociale.
Le décret publié un an après la loi votée par le Parlement permet donc également aux descendants des exploitants salariés ou indépendants qui ont été exposé in utero, à condition que l'un de leurs deux parents ait été exposé et ayants-droits ou héritiers qui demandent une réparation indirecte pour leurs parents qui ne sont plus là aujourd'hui pour demander réparation de faire valoir leur cas.
Comment faire sa demande d'indemnisation ?
Néanmoins, le texte long de 11 pages prévoit un grand nombre de conditions pour obtenir une indemnisation. L'impact du pesticide sur la santé du requérant doit être prouvé médicalement. "Le dossier complet de la demande d’indemnisation comprend la déclaration de la maladie professionnelle, le certificat médical initial et, le cas échéant, les examens complémentaires rendus nécessaires par le tableau de maladie professionnelle", précise le décret.
Les victimes d’une maladie professionnelle liée aux pesticides (hors cas des enfants exposés), doivent faire leur demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de leur caisse d’affiliation (Cpam, caisse MSA, caisse générale de Sécurité sociale (CGSS), ou caisse locale d’assurance accidents agricoles d’Alsace-Moselle).
Elles peuvent également saisir directement à titre exceptionnel le fonds d'indemnisation des victimes de pesticides.
Une première étape
"J’aurais souhaité que ce fonds puisse prendre en charge l’intégralité des dommages subis mais il permettra au moins d’améliorer considérablement le sort des victimes de pesticides", confie la sénatrice de Martinique, Catherine Conconne.
Si elle estime que ce décret est une étape importante vers la réparation de l'empoisonnement au chlordécone, la parlementaire dit rester "attentive à ce que l’Etat poursuive ses démarches pour qu’aucune victime de ce pesticide ne soit abandonnée".
"Il est maintenant nécessaire d’accompagner, chez nous, le recensement et le suivi de tous les exploitants et anciens exploitants, comme annoncé par le plan chlordécone IV, afin qu’ils puissent bénéficier au mieux de ce fonds", insiste Catherine Conconne.
Les dépenses (53 millions d’euros d’ici à 2022) seront notamment financées par un relèvement progressif de la taxe sur les ventes de pesticides et par les cotisations accidents du travail et maladies professionnelles.