Les Mexicains commencent à voter pour l'élection historique d'une première présidente

Par 02/06/2024 - 10:36

Le vote a commencé dimanche au Mexique, où près de 100 millions d'électeurs inscrits s'apprêtent, sauf coup de théâtre, à élire dimanche la première femme présidente dans l'histoire du plus grand pays hispanophone au monde, où l'ONU décompte neuf à dix féminicides par jour.

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Image d'illustration

Les premiers bureaux de vote ont ouvert dans la région de Cancún (sud-est) à 08 heures, heure locale, où des électeurs faisaient déjà la queue pour voter, a constaté un journaliste de l'AFP.

Les bureaux doivent ouvrir dans la région centrale dont la capitale Mexico, où la gauche au pouvoir se bat pour garder la mairie aux élections locales. 

25 candidats aux élections locales tués

La favorite de la présidentielle est la candidate de la gauche au pouvoir, Claudia Sheinbaum, du Mouvement pour la régénération nationale (Morena).

En trois mois de campagne, l'ex-maire de Mexico (2018-2023) a régulièrement devancé de 17 points en moyenne dans les sondages sa rivale de centre droit Xochitl Galvez, soutenue par une coalition de trois partis.

Les deux favorites doivent voter de bonne heure à Mexico, tout comme l'outsider Jorge Maynez, 38 ans, représentant du minoritaire Mouvement citoyen.

Outre la présidentielle, les électeurs sont appelés à renouveler le Congrès et le Sénat, à choisir les gouverneurs dans neuf des 32 États et à désigner des députés locaux et maires.

En tout, 20.000 postes sont à pourvoir lors de ces élections à un tour. Les premières tendances pour la présidentielle seront connues quelques heures après la fermeture des bureaux de vote à minuit, heure de Mexico.

La violence a rattrapé la campagne avec au moins 25 candidats aux élections locales tués dans ce pays miné par le narcotrafic, qui est aussi le premier partenaire commercial des États-Unis.

Un candidat a encore été tué vendredi dans l'État de Puebla (centre). 

Le gouvernement avait fait état de 22 assassinats mardi, avant trois autres par la suite. Il a aussi annoncé un renforcement de la sécurité le jour du vote. 

"Le temps des femmes"

"Nous allons entrer dans l'histoire", a proclamé Claudia Sheinbaum, 61 ans, portée par la popularité du président sortant Andres Manuel Lopez Obrador, 70 ans.

"C'est le temps des femmes et de la transformation", a-t-elle lancé à l'adresse des Mexicaines, qui dénoncent à l'unisson une société machiste. 

"Cela veut dire vivre sans peur et être libre de violences", a ajouté Mme Sheinbaum. "Chaque jour, une moyenne de neuf à dix femmes sont assassinées" au Mexique, selon l'ONU Femmes.

Xochitl Galvez mise elle sur un "vote caché" en sa faveur, qui aurait échappé aux sondages, pour gagner.

D'origine modeste, cette fille d'un père indigène, cheffe d'entreprise, a dénoncé l'échec de la politique de sécurité du gouvernement sortant, parlant de "186.000 personnes assassinées et 50.000 personnes disparues" depuis 2018.

"Avoir une femme présidente te motive, c'est comme la preuve que c'est possible", affirme Blanca Sosa, 31 ans, vendeuse dans une boutique du Zocalo, la plus grande place du Mexique.

Mme Sosa pense que sa candidate, Claudia Sheinbaum, poursuivra la politique sociale du président sortant qui "a fait de bonnes choses comme l'augmentation du salaire minimum ou l'aide aux personnes âgées".

Au contraire, Ricardo Sanchez, un commerçant de 55 ans à Monterrey (nord), votera pour Xochitl Galvez pour sa "vision de l'entreprise".

De nombreux défis

La lutte contre la violence des cartels, des gangs et des bandes sera le premier défi de la future présidente, d'après Michael Shifter, chercheur au centre d'analyse Dialogo Interamericano, dont le siège est à Washington.

Au total, quelque 450.000 personnes ont été assassinées au Mexique depuis 2006, quand l'ex-président Felipe Calderon a envoyé l'armée contre les cartels.

Mme Sheinbaum a promis de poursuivre la politique actuelle (s'attaquer aux causes de la violence plutôt que le tout répressif) tout en luttant contre "l'impunité". Mme Galvez a promis d'en finir avec les "accolades" aux cartels.

La "presidenta" devra également consolider l'État-providence dans un contexte budgétaire qui se dégrade (des prévisions annoncent un déficit à 5,9% du PIB pour 2024, le plus important depuis des décennies).

Elle devra encore gérer la relation bilatérale intense et complexe avec les États-Unis.

Washington demande à Mexico de lutter contre le trafic de fentanyl, une drogue de synthèse qui provoque des milliers d'overdoses aux États-Unis.

Le Mexique a pour sa part déposé deux plaintes aux États-Unis contre des fabricants d'armes américains, qu'il accuse d'être responsables de tueries sur son territoire.

Les deux pays sont confrontés au défi de l'immigration clandestine qui bat des records, avec 2,4 millions d'arrestations côté américain en 2023, d'après les autorités américaines.

La "presidenta" attendra l'élection de novembre au nord du Rio Grande pour savoir si elle aura pour interlocuteur le président démocrate sortant Joe Biden ou le républicain Donald Trump.


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