Mickaël Harpon : la tuerie de la préfecture de police de Paris aurait-elle pu être évitée ?
Les proches d'une victime demandent aujourd'hui à l'Etat de reconnaître ses responsabilités dans l'attentat à la préfecture de police de Paris, le 3 octobre 2019. Selon eux, rien n'a été fait alors que le profil d'une radicalisation de l'agent administratif martiniquais était évident.
Quatre ans et demi après les faits, les investigations sont achevées et l'information judiciaire est arrivée à son terme. Rien n'a permis d'établir de potentielles complicités donc Mickaël Harpon abattu par un policier stagiaire dans la cour de la préfecture, les proches des victimes se sont préparées à ne jamais avoir de procès.
Mais pour la famille de Damien Ernest, l'un des supérieurs du tueur, le pire aurait pu être évité. Selon les avocats des proches, cités par Le Parisien, "l'attentat a été rendu possible par la conjonction de fautes individuelles et collectives majeures dans l'organisation de la Direction du Renseignement de la Préfecture de Police de Paris".
Dans le mémoire qu'ils ont transmis au ministère de l'Intérieur, les signaux flagrants de radicalisation de Mickaël Harpon sont détaillés. Des évènements qui n'ont pas été signalés ou s'ils l'ont été, n'ont pas eu de suite. Bien avant avant les faits, l'agent administratif converti à l'islam depuis 2008 intriguait et son comportement inquiétait de plus en plus ses collègues. Il fréquentait notamment une mosquée du Val d'Oise dont l'imam était fiché S, surveillée par les services de renseignements, refusait de faire la bise aux femmes, jouait au football avec un groupe lié par une pratique de l'islam très radicale.
« Auto-censure générale »
En 2015, suite aux attentats de Charlie Hebdo, il avait déclaré "c'est bien fait" sur son lieu de travail et avait aussi menacé de mort une collègue lors d'un vif échange sur la religion. Si certains s'inquiétaient des risques qu'à son poste, il puisse révéler des informations, et avaient demandé à ce qu'une surveillance soit mise en place, la hiérarchie a toujours refusé, semblant même sous-estimer la menace, en dépit des nombreuses alertes de ses collègues. "Une auto-censure générale", fustigent les deux avocats dans les colonnes du Parisien. L'habilitation secret-défense de Mickaël Harpon lui avait même été renouvelée.
Lors de l'enquête, le profil psychiatrique de l'agent martiniquais avait aussi été mis en avant. Entré à la préfecture de police en 2003, le martiniquais aurait ressenti une certaine frustration professionnelle et se serait senti mis à l'écart en raison de sa surdité. Un "délire mystique et suicidaire" avait été évoqué quelques mois après la tuerie.
Pour les proches Damien Ernest, si l'administration ne reconnaît pas ses responsabilité dans le délai légal des deux mois, un recours devant le tribunal administratif est envisagé.