Haïti : les avocats crient leur ras-le-bol

Par 09/04/2022 - 14:03

En Haïti, des avocats abandonnent leur profession pour devenir des chauffeurs de taxis parce qu'ils ne peuvent plus travailler en toute sécurité. Les kidnappings et assassinats des professionnels du droit hantent désormais le quotidien de ces derniers. Des agressions perpétrées par des gangs armés, désormais installés à proximité du Palais de Justice de Port-au-Prince.

    Haïti : les avocats crient leur ras-le-bol

Les avocats du barreau de Port-au-Prince ont manifesté, ce vendredi, devant l’entrée de la résidence officielle du Premier ministre Ariel Henry.

Ils entendaient, lors d'un sit-in de quelques minutes, protester contre le climat d’insécurité qui règne aux abords du Palais de justice comme le relate Maître Sylvie Legros, la bâtonnière de l’ordre des avocats à Port au Prince:

On ne peut plus vivre dans ce climat, qui dure depuis près de trois ans. On peut se faire kidnapper et les auteurs nous demandent jusqu'à deux millions de dollars US pour nous libérer.

Si le danger est réel pour les professionnels du droit, aucune audience ne s'est tenue au Palais de Justice depuis un mois.

En février notamment, sept kidnappings d'avocats ont eu lieu, faisant un blessé grave, touché par balles.

En effet, longtemps cantonnés dans des zones éloignées du coeur de ville, plusieurs gangs armés se sont installés non loin des bâtiments du Palais de justice et font régner la terreur multipliant les attaques et les enlèvements crapuleux.

Relocaliser le Tribunal de Port-au-Prince est donc l'une des premières revendications des protestataires car il est désormais rare que les magistrats et avocats risquent à s'y rendre.

Si, face à cette demande de relocalisation, les autorités ont mis en place un couloir de sécurité pour accéder aux bâtiment, celui-ci ne protège en rien les professionnels du droit:

Dès qu'il y a un dossier sensible, celui-ci nous est systématiquement volé.

L'intrusion dans gangs dans le tribunal n'est plus, non plus, chose rare. Les membres armés viennent en effet y récupérer des accusés, proches de leurs groupes, pour les faire évader.

Ainsi, de plus en plus d'avocats décident de changer de profession ou d'exercer ailleurs qu'en Haïti.

Certains mettent donc le cap vers les États-Unis ou le Canada quand d'autres deviennent chauffeur de taxis.

De plus, un tel blocage de l'appareil judiciaire ne fait qu'aggraver la surpopulation carcérale haïtienne, déjà parmi les plus élevées au monde.

Si les prisons du pays ont la capacité d'accueillir trois mille détenus, plus de onze mille deux cents personnes y sont aujourd'hui incarcérées, dont plus de 82% en attente de jugement, selon l'administration carcérale.

 


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