Dans les Caraïbes, la mobilisation s’intensifie contre les arrivées massives de sargasses
Depuis plus d’une décennie, les Antilles et l’ensemble des Caraïbes subissent les conséquences des échouages massifs d’algues brunes toxiques. Santé, économie, transports : les impacts sont considérables et poussent les habitants, les associations et les avocats à se mobiliser.
Depuis 2011, les sargasses déferlent régulièrement sur les littoraux antillais. Elles dégagent des gaz toxiques comme le sulfure d’hydrogène et l’ammoniac. En mars 2025, des chercheurs de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) ont révélé l’origine du phénomène :
Une anomalie de courant, en 2009 et en 2010, aurait transporté ces algues hors de leur zone d'origine (la mer des Sargasses), située dans l'océan Atlantique nord.
Une fois arrivées dans les zones tropicales, elles auraient rencontré “des conditions favorables à leur développement, entre autres des nutriments issus des activités agricoles humaines”, expliquent les chercheurs.
Des entreprises pénalisées
Les nuisances ne sont plus seulement environnementales. Elles touchent la santé publique, mais aussi l’économie locale. “Ces sargasses ont des impacts sur la santé, notamment respiratoire, mais pas seulement : les entreprises subissent des pertes avec ce phénomène d'algues brunes”, affirme Me Alik Labejof-Lordinot.
L’avocat a lancé début août un appel à agir en justice :
Nous souhaitons formuler un recours collectif au tribunal administratif avec une requête en indemnisation à hauteur de 15.000 euros par personne.
Plusieurs entreprises installées près des littoraux ont dû fermer leurs portes, leur matériel étant détérioré par la corrosion due aux gaz toxiques.
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Des îles coupées du monde
Les conséquences peuvent aller jusqu’à l’isolement de certaines îles. En mai dernier, la Désirade a été privée de toute desserte pendant plusieurs jours. Les sargasses bloquaient le port, empêchant aussi bien le ferry public que la barge de ravitaillement d’accéder à l’île.
À Marie-Galante, près de 40 % des sargasses de la zone s’échouent en raison de sa façade Atlantique. Là, les émissions atteignent des niveaux records. Selon Gwad’air, la concentration en sulfure d’hydrogène s’élevait à 5,32 ppm le 27 août et avait déjà atteint 7,17 ppm mi-août.
Une gestion bien insuffisante
Pour tenter de mutualiser les coûts de ramassage et mettre en place des barrages, un groupement d’intérêt public avait été créé en 2023. Mais dans les faits, il est resté inopérant, laissant l’essentiel de la charge aux communes et à l’État, qui finance déjà 80 % de la collecte.
D’ici la fin de l’année, un syndicat mixte rassemblant les acteurs publics et privés devrait voir le jour. Une évolution nécessaire, d’autant que les sites de stockage sont saturés depuis plusieurs années et jugés “non conformes à la réglementation” selon la chambre régionale des comptes.
En 2025, 17 communes de Guadeloupe ont été touchées, contre 13 les années précédentes, selon la cellule Pulsar, chargée de coordonner la gestion du phénomène.
Mais c’est l’ensemble des Caraïbes qui fait face à ce fléau. Du Venezuela aux petites îles de l’Organisation des États de la Caraïbe orientale, tous les pays concernés appellent à une coopération internationale.








