Terrain, appartements, Guadeloupe TV au cœur du procès des ex-dirigeants de la Semsamar

Par 04/10/2024 - 05:00

Depuis lundi et jusqu'au 10 octobre, trois anciens dirigeants de la Semsamar, Jean-Paul Fischer, Marie-Paule Belenus Romana et l’ancien administrateur Louis-Constant Fleming, comparaissent devant le tribunal judiciaire de Paris pour « prises illégales d'intérêt, abus de biens sociaux et favoritisme ».

    Terrain, appartements, Guadeloupe TV au cœur du procès des ex-dirigeants de la Semsamar

Ce jeudi, au 4ème jour de procès des ex-dirigeants de la Semsamar l'un des gros dossiers de ce procès a été évoqué, celui des terrains achetés par la Semsamar en 2009 à la mère de l'ancien sénateur de Saint-Martin, Louis-Constant Fleming, qui était alors l'un des administrateurs de la société.

Le moins que l'on puisse dire, c’est que c’est une affaire de gros sous. 6 106 650 euros pour les 111 000 mètres carrés de ces terrains de Spring, à Marigot. Une coquette somme qui n'est pourtant pas au coeur de la procédure.

Mais, là où la cour s'interroge, c'est sur la prise illégale d'intérêts.

Car à l'époque, Louis-Constant Fleming, l'un des fondateurs de la Semsamar en 1985, fait son retour au sein de son conseil d'administration, plus de 15 ans après sa démission suite à des désaccords en interne.

Hasard ou coïncidence, c'est à ce moment là que la Sem se trouve en position d'acheter des terrains appartenant à sa propre mère. Ce qui gêne, c'est que M. Fleming a voté en faveur de cette vente lors d'un conseil d'administration de la Semsamar où il était représenté.

Absent à Paris, ce derniern par ses avocatsn parle d'une erreur dans l'ordre du jour qui lui avait été envoyé, ainsi que de la méconnaissance de celle qui le représentait. Cette dernière n'aurait pas compris qu'elle donnait son accord à une transaction qui le concernait.

Négociation qui interroge

La négociation est aussi sujette à question, M. Fleming aurait obtenu gain de cause pour le prix au mètre carré, malgré une proposition initiale et une estimation des domaines plus basse.

Alors, y'a t-il eu complicité? Impossible pour M. Fischer, qui dirigeait la Sem à l'époque.

« Notre relation n'était pas amicale. Pendant des années il annonçait partout qu'il voulait débarrasser l'île de ma personne », objecte-t-il, assurant n'avoir vu dans cette transaction qu'un intérêt foncier, dans un contexte de raréfaction des terres à Saint-Martin.

En l'absence de M. Fleming au procès, sa version manque, même si sa défense brandit la générosité de sa famille qui en parallèle de ces juteuses opérations, avait gracieusement cédé les terres pour le centre hospitalier, la médiathèque ainsi qu'un plateau sportif à Marigot.

La première semaine du procès des anciens dirigeants de la Semsamar s'est clôturée ce jeudi soir. L’audience reprendra lundi (7 octobre) au tribunal judiciaire de Paris.


ET AUSSI

  • Rémunérations des dirigeants et statuts de la Semsamar

Depuis le début de ce procès, des moments de tensions ont agité le tribunal, notamment autour des sujets qui ne figurent plus dans cette affaire, ou des changements survenus au fil de l'instruction.

En l'occurrence : les rémunérations des anciens dirigeants, mais aussi le statut de la société Semsamar, initialement mise en examen qui s'est désormais constituée partie civile dans ce procès après avoir été relaxée.

Un contexte qui agace l'avocat de Jean-Paul Fischer, Maître Olivier Morice.

On a l'air de vouloir donner une tonalité à travers ces rémunérations qui ont été versées. On ne le reproche pas, mais d'un autre côté, on va en tenir compte. Ce n'est pas dans la prévention, mais on en parle quand même. J'ai aussi trouvé que les questions du président étaient exclusivement à charge. Or, ce qui apparaît aujourd'hui d'une manière très claire, c'est que dans l'affaire dite de la Semsamar, la Semsamar n'est pas présente, il n'y a pas de représentant de la Semsamar. Ses avocats n'ont posé, depuis le début de ce procès, aucune question. Et les demandes indemnitaires qu'ils font sont ridicules. C'est un dossier qui a été outrageusement surgonflé. C'est-à-dire qu'on en a fait une baudruche qui était bien remplie. Et cette baudruche, elle est en train complètement de s'effondrer.

  • Une « instruction manquée », pour la Défense

La première semaine marquée par l'examen de dossiers importants dans cette affaire très complexe, mais aussi par de nombreux incidents d'audience. Les avocats de la défense continuant de dénoncer une instruction manquée qui n'aide pas à la clarté, comme Maître Corinne Dreyfus-Schmidt.

C'est une instruction ni faite ni à faire. D'ailleurs, ce n'est pas à nous d'amener la preuve d'un certain nombre de choses, c'est à l'accusation, qui est bien en mal de démontrer des choses. C'est en revanche à nous, systématiquement, de devoir justifier de documents auprès du tribunal et du juge. C'est quand même l'inversement de la charge de la preuve qui est faite là. Ensuite, c'est un dossier très vieux, qui ne respecte pas le principe du délai raisonnable, puisque c'est un dossier qui a 14 ans et qui a été fait en dépit du bon sens, parce qu'il était complexe. Je pense que les trois juges d'instruction n'ont pas eu la volonté de se plonger vraiment dans les investigations à mener et se sont contentés du rapport des experts comptables, qui ne sont que des experts comptables.

  • Des appartements à prix préférentiels

Mercredi, l’audience a notamment été consacrée aux achats d'appartements à des prix préférentiels. Marie-Paule Belenus Romana avait-elle le droit de bénéficier d'une ristourne sur l'achat d'appartements? Oui, selon elle, qui l'avait déjà fait en tant que salariée dans le passé, mais qui n'y aurait plus été éligible en tant que directrice générale, selon des alertes des commissaires aux comptes.

« Cela ne m'est pas venue à l'esprit, c'était de bonne foi », se défend cette dernière, disant s'être appuyée sur les conseils d'avocats, avant de conclure: « S'il le faut je rembourserai ».

  • Investissements à Guadeloupe TV dans le viseur

Les investissements au sein de la société GTV ont également été évoqués cette semaine.

Investisseurs à titre personnel dans ce projet, Marie-Paule Belenus Romana et Jean-Paul Fischer, avaient aussi été parties prenantes d'un apport en capital réalisé par la Semsamar.

La première était directrice générale, via sa filiale Samagest, le second était le gérant, pour apporter 300 000 euros à cette télévision qui peinait à décoller. Etait-ce la vocation d'un bailleur social? Là encore, les interprétations divergent.

Y'a-t-il eu des pressions? Oui dit Mme Bélénus Romana citant notamment le nom de Victorin Lurel, président de région à l'époque, ce dont il s'était pourtant défendu lors des auditions.

La Semsamar a-t-elle été embarquée dans une entreprise vouée à l'échec? Peut-être, selon M. Fischer, qui dit avoir constaté rapidement des difficultés. « On y croyait tous », contraste Mme Belenus Romana... « Pas lui », rétorque le juge... « C'est ce qu'il dit », conclut-elle.

 

 


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