« Mai 67 », un polar écrit par l’ancien journaliste Thomas Cantaloube

Par 23/07/2023 - 11:07 • Mis à jour le 24/07/2023 - 04:56

Quand le massacre de Mai 67 en Guadeloupe devient un sujet de polar ! Récemment publié aux Edition Gallimard, cet ouvrage de l'ex-journaliste Thomas Cantaloube conclut sa trilogie sur les origines de la 5e République.

    « Mai 67 », un polar écrit par l’ancien journaliste Thomas Cantaloube
Un livre à retrouver dans la collection Série Noire aux Editions Gallimard

Le livre « Mai 67 » de Thomas Cantaloube vient de paraître aux éditions Gallimard. Celui-ci s’inscrit dans le cadre d’une trilogie qui explore les origines de la Cinquième République sur fond de décolonisation, et dont les deux premiers tomes se passaient en Algérie et en Françafrique.

Dans ce dernier opus, l’auteur plonge ses trois héros de fiction dans la réalité des émeutes survenues à Basse-Terre et Pointe-à-Pitre en mai 67 ayant conduit aux bavures des forces de sécurité qui avaient causé la mort d’au moins 8 personnes, selon le dernier bilan historique.

Dans un premier temps, ce sont des événements que Thomas Cantaloube avait découvert par curiosité journalistique : 

Moi, j'ai découvert ça en tant que journaliste, plus en tant que spectateur et auditeur informé, au sens où quand il y a eu les manifestations contre la vie chère en 2009, puis les barrages sur les routes au moment du Covid contre l'obligation vaccinale, à chaque fois qu'il y avait eu un soulèvement en Guadeloupe, on voyait réémerger des gens qui parlaient de mai 67, dans les témoignages qu'on pouvait entendre à la radio, voire à la télévision. 

Il s'agissait d'un exercice particulier pour Thomas Cantaloube qui a dû faire un gros travail de documentation et de terrain en Guadeloupe pour relater ces événements :

Mon trio de personnages est complètement inventé. Les histoires auxquelles ils se confrontent sont essentiellement inventées, mais le terreau dans lequel ils se promènent est l'histoire de France. Donc effectivement, je procède à un grand travail de documentation. Mais ce qui m'intéresse, c'est de montrer cette partie de l'histoire au travers du Polar. En gros, il y a un meurtre ou plusieurs meurtres et on cherche à découvrir le coupable. C'est la recette du Polar typique et là-dessus je greffe des événements historiques qui se sont vraiment produits. On croise des personnalités politiques qui ont vraiment existé. Je m'attache à respecter scrupuleusement la vérité historique, c'est-à-dire que je ne leur fais pas faire n'importe quoi, y compris quand je les insère dans des dialogues, je ne leur fais pas dire n'importe quoi. Je leur fais prononcer des dialogues dont on imagine très bien qu'ils auraient pu les prononcer. Pour moi, c'est une autre approche que l'approche des manuels d'histoire ou des essais journalistico-historiques.

Une histoire méconnue en Hexagone 

Ces événements suscitent un intérêt artistique comme ce fut le cas du réalisateur guadeloupéen Jimmy Laporal Tresor qui travaille d’ailleurs sur un long-métrage sur le sujet. Pour Thomas Cantaloube, ce qui s’est passé en mai 67 doit être raconté : 

Je pense qu'effectivement, c'est un peu une zone d'ombre de ce qu'on voit depuis la Métropole. Je ne prétends pas vouloir raconter ça à la place des principaux intéressés qui sont les Antillais. Moi, je suis un Métropolitain né en Métropole, qui a grandi en Métropole, donc c'est une histoire qui m'intéresse de mon point de vue finalement de Métropolitain en me disant « Comment ça se fait qu'on m'ait caché ces événements ou qu'on ne m'a pas parlé de ces événements dans l'histoire de France ? ». Moi, je suis français et je voudrais qu'on me parle de ce qui se passe en Guadeloupe et en Martinique à partir du moment où c'est la France et je pense qu'il y a probablement un terreau de fiction à explorer aussi, de fiction, de documentaire, de trucs comme ça sur ces événements.

Les événements de mai 1967 font également un triste écho à l’actualité, que ce soit dans les revendications d’égalité des territoires ultramarins que dans la mort du jeune Nahël à Nanterre. Il y a de quoi s’interroger pour Thomas Cantaloube : 

J'ai du mal à m'empêcher de voir la situation présente, même quand j'écris un roman historique. Si le lecteur, en lisant mes romans, se dit « Tient, c'est curieux, ça a des échos avec notre situation contemporaine », c'est tant mieux. Je pense qu'on écrit toujours depuis une période, depuis un endroit. Évidemment que ça suscite des réflexions. La manière dont Paris continue à traiter les Dom-Tom un peu par dessus la jambe, la manière dont effectivement un racisme persistant existe dans la société française. Ce sont des questions très présentes aujourd'hui. On a encore pu le voir il y a moins de quelques semaines avec les nombreuses émeutes qui se sont produites partout en France, qui est l'origine des violences policières et probablement aussi des violences policières racistes. C'est quelque chose qui parle aujourd'hui comme ça parlait en mai 67.


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