Naufrage mortel de Capesterre-Belle-Eau : « je n'ai rien pu faire… »
EXCLUSIF RCI. Ce drame s’est déroulé au large de nos côtes. Jeudi 18 mai, un bateau chavirait au large de Four à Chaux à Capesterre avec à son bord 4 hommes. Un seul d’entre eux a survécu en nageant pendant près de 5h. Cédric Selbonne raconte pour la première fois sur notre antenne le calvaire qu'il a vécu.
Son regard est teinté d'une tristesse indicible. Cédric Selbonne hésite à raconter le drame qu'il a vécu, un traumatisme qui hante cet homme de 44 ans.
Je n'arrive pas à dormir, je ne mange pas bien. Je fais avec. Je tiens le coup
Jeudi 18 mai, Cédric se retrouve avec trois hommes à Four à Chaux, sur la commune de Capesterre-Belle-Eau. Tous embarquent à bord d'un bateau de plaisance d'environ 4 mètres. Le propriétaire, âgé de 61 ans, est parmi eux. Il veut installer en mer un dispositif de concentration de poissons.
Et pour cela, il a emporté le moteur d'une voiture. Les quatre hommes pensent partir pour quelques heures. Mais une fois au large, ils doivent affronter une forte houle. Bientôt, l'embarcation surchargée ne résiste pas aux flots.
Le bateau s'enfonce vite
« Avec la vaque qui est sortie d’où elle est sortie, elle est rentrée à l'intérieur et c'est ce qui a coulé le bateau », affirme l'unique rescapé.
Alors que le bateau s'enfonce, les passagers n'ont pas le temps de revêtir des gilets de sauvetage.
Ils étaient dans une trappe. Pour les prendre, c'était difficile. Entre le moment où l'eau est rentrée à l'intérieur du bateau et celui où on a voulu récupérer les gilets, on n'a pas eu le temps d’ouvrir la trappe parce que le bateau était imbibé d'eau. Ça empêchait la porte de s'ouvrir, on ne pouvait rien faire. Alors tout le monde a sauté dans l'eau
Dans l'eau, le groupe se sépare. « Les deux « grands » ont dit qu’ils restent sur leur bouée que nous étions censés mettre à l’eau. Et nous, les deux jeunes, on se débrouille. Alors, j'ai dit au gars, suis-moi, on part, on va avertir les pompiers ».
Un périple en mer
Les deux hommes commencent leur périple. Cédric prend la tête et est guidé par les installations de Jarry visibles à plusieurs kilomètres. Mais son compagnon, âgé de 48 ans, peine à suivre.
Je regardais chaque fois derrière moi pour voir si je le voyais, il me voyait aussi. Mais, à un moment donné, il m'a dit « je n'en peux plus ». Alors là, je n'ai rien pu faire. Le gars est plus corpulent que moi, plus haut que moi, je ne pouvais rien faire. Alors j'ai continué et, en faisant quelques brasses, j’ai regardé derrière moi et je n'ai vu personne… Il était déjà en-dessous
Animé par sa volonté de survivre, Cédric continue. Trois fois, il se voit mourir. Il se met alors sur le dos et recrache l’eau qui a pénétré dans ses poumons.
Comme j'ai fait la natation, c'est ce qui m'a sauvé la vie aussi. Les autres n'étaient pas de très bons nageurs
Au bout de cinq heures d'intenses effort, Cédric parvient enfin sur le rivage. Immédiatement, il va voir un ami du propriétaire du bateau coulé pour l’informer de l’urgence de la situation. Il repart au large avec cet autre marin-pêcheur. « On a cherché, cherché mais rien à faire ». Ils ne retrouvent personne. Ils alertent alors les pompiers, les secours organisent les recherches mais il est trop tard.
Les corps de ses trois compagnons d'infortune seront retrouvés l'un après l'autre sur la plage de Sainte-Claire à Goyave. « Ça m'avait tellement de mal là. Mais oui, j'étais avec eux. J'étais avec eux… ».
Ce drame, Cédric le revit encore et encore. Il n'oubliera jamais les visages de ses trois compagnons...
A ECOUTER : Le reportage de Cécile Loïal