Comment adapter la défense militaire au réchauffement climatique en Martinique ?
Un séminaire de réflexion relatif à l’impact du dérèglement climatique sur les enjeux de Défense des forces armées s'est tenu hier matin (jeudi 25 mai), au fort Saint-Louis à Fort-de-France.
Comment effectuer la mission principale des forces armées en Martinique, qui est de « porter secours et assistance aux populations » avec des conditions environnementales difficiles ?
C’est la grande question abordée lors du séminaire de ce jeudi à la base navale de Fort-de-France. Scientifiques, universitaires français et forces armées aux Antilles, du Canada et des États-Unis étaient présents pour en discuter.
Le basculement climatique est prévu en 2050 selon les scientifiques et les forces armées s’y préparent depuis quelques années. Dès 2016, le Ministère des forces armées a mis en place « l’Observatoire Défense et Climat » dédié aux recherches sur ce thème.
Depuis sa création, plusieurs rencontres ont été organisées entre universitaires, responsables de la Défense et experts du climat autour de la question. Et c’est dans ce cadre que, l’année dernière, une note a été écrite sur la vulnérabilité de la Caraïbe insulaire par rapport au climat, explique Marine de Gugliemo-Weber, enseignante-chercheuse à l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques).
Les changements climatiques menacent les infrastructures, notamment les bases militaires sur les côtes qui sont menacées de submersion. Il y a aussi la question du fonctionnement des équipements car plus les températures sont élevées et moins les équipements sont pérennes
La santé des soldats fait également partie des préoccupations, car « un soldat qui évolue dans des températures élevées est exposé à des malaises, des coups de chaleurs, des risques de maladie clinique et rénale », décrit la scientifique.
Échanger et apporter des solutions
Réduire une vulnérabilité aux changement climatique pour être en mesure de répondre aux défis futurs, c’est l’objectif des forces armées. Selon Eric Aymard, commandant des Forces armées de Martinique, pour se préparer, il faut s’adapter.
D’abord adapter les entrainements des soldats et leur capacité à mener des missions sous une température beaucoup chaude, plus humide ou plus sèche
Les équipements militaires eux aussi sont menacés par les hausses de températures, avec une enveloppe d’utilisation limitée à une certaine jauge de degré.
Si à l’avenir, il fait régulièrement 45 °, nous aurons un équipement défaillant. Il faut qu’on l'adapte. Tout comme les infrastructures. Par exemple, nous n’allons pas rester à côté de l’aéroport si la mangrove est sous l’eau
Cette réflexion, le ministère des forces armées l’avait abordé dans le rapport « Stratégie défense climat », publié en avril 2022. Il visait à prendre en compte l’impact des forces armées sur le climat par le biais des émissions carbones et l’impact du climat sur les forces armées françaises. Marine de Gugliemo-Weber en explique les quatre grands piliers.
D’abord s’adapter. Donc réduire l’impact des changements climatiques sur les capacités et les bâtiments de l’armée. Ensuite atténuer. Ainsi réduire l’impact des forces armées sur le climat. Puis anticiper et connaitre afin de prévoir l’évolution des conditions climatiques et leurs impacts. Et enfin que l’ensemble des forces françaises coopère
Selon la chercheuse, il existe un double enjeu qui est de prévoir en quoi les capacités des forces armées seront affectées et prévoir la prise en charge en matière de risque pour la population.
Un besoin de réflexion collective
Les représentants de l’Université des Antilles et de la Guyane, de Météo-France, de l’IRIS, de la SARA ainsi que les représentants des forces armées américaines, canadiennes et barbadiennes s’étaient réunis durant toute la journée afin de faire un état de lieu de la situation actuelle et discuter des stratégies à adopter en fonction.
Un séminaire « ouvert », c’est ce que désirait Eric Aymard.
C’est un sujet qui concerne tout le monde. Aujourd’hui nous parlons des impacts que cela aura sur les capacités militaires. Je ne voulais pas d'un séminaire juste entre militaires. Ce qui explique la présence d’universitaires et de scientifiques
Bradley Comerey, ingénieur au service des forces armées de la Floride du Sud, s’intéresse au fonctionnement des Antilles en matière de climat.
Les forces armées américaines et l’unité du sud Southern Common sont en train d’analyser l’impact du changement climatique sur leur secteur. Donc c’est intéressant de savoir ce que la France fait ici car c’est similaire à ce que nous recherchons en termes de développement
Un enjeu global qui nécessite une réflexion commune, soutient encore Eric Aymard.
C’est un problème qui concerne toute la Caraïbe et même la planète entière. J’ai souhaité inviter différents acteurs pour avoir une réflexion commune sur le sujet. Puis à l’avenir, mettre en place des actions communes