Explosion du prix du gaz en Martinique : des initiatives pour y faire face quotidiennement
Vue la hausse toujours plus accrue du prix du gaz en Martinique, certains mettent en place des initiatives pour limiter son impact sur la vie quotidienne.
Juliette, 74 ans, cuisine au feu de bois
Ce mois de novembre marque l'explosion du prix de la bonbonne de gaz en Martinique. Avec une bouteille de 12,5kg vendue à 31,87€ en Martinique, contre 28,06€ en Guadeloupe ou encore 25€ en grande surface en France hexagonale, l'augmentation du prix de ce produit de première nécessité impacte l'ensemble des foyers et en particulier les familles et personnes en situation précaire.
En effet, cette inflation touche particulièrement la Martinique depuis maintenant juillet 2020. Bien que deux légères baisses ont eu lieu en mai et août de l'année dernière, cette hausse globale ne semble pas prête de s'arrêter. Elle s'explique notamment par l'augmentation du coût du produit brut qui, comme bon nombre de matières premières depuis le début de l'épidémie, sont en incessante hausse. C'est ce que confirme ce livreur, rencontré dans le nord caraïbes :
Sur le réseau, les dépositaires prennent de moins en moins de gaz, c'est pas avantageux. Et c'est pas fini : le mois prochain, ça va encore augmenter donc forcément la clientèle va diminuer, ils vont tous passer à l’électrique
Alors pour faire face à cette situation, des initiatives sont mises en place par certains, chacun à leur échelle.
Au quartier Epinay Grand Fleur à Sainte-Luce, Juliette, 74 ans, a choisi de délaisser la bonbonne de gaz au profit du feu de bois. C'est ainsi qu'elle cuit ses aliments chaque jour :
En ce moment, le gaz est très cher, alors tant que je peux encore descendre les escaliers, je préfère faire sur le bois. Parfois, quand il pleut je ne vais pas allumer un feu, si j'ai envie de faire une petite crème le soir, je vais faire sur le gaz, et la bouteille peut me durer 3 mois
A écouter Un entretien avec Juliette, au micro de Peggy Saint-Ville à écouter ici :
La solidarité comme axe fort
Au Lamentin, à Morne Pitault, l'épicerie Riv Boutique est l'un des témoins directs des effets de cette inflation. Dans son commerce de quartier, Fernand Yung-Hing a un véritable rapport de proximité avec ses clients. Par solidarité, il joue la carte sociale auprès de certains de ses plus anciens clients pour permettre l'accession à ce produit devenu presque un luxe pour certaines personnes âgées :
C'est l'épicerie du quartier, vous savez, on fait toujours du social. C'est à dire que je donne un coup de main à ces gens-là : tu vas me payer quand tu auras touché ta pension. Parce que la personne âgée ne peut pas faire autrement, elle est obligée d'allumer son gaz pour faire son café, son haricot rouge etc...
Au François, ce problème a été très vite pris en compte par la municipalité. Ainsi, les familles assujetties aux minimas sociaux peuvent bénéficier d'un bon d'achat de 12 euros auprès de 5 fournisseurs de la ville. C'est le CCAS qui a mis en place ce dispositif exceptionnel, valable jusqu'au 31 décembre. C'est ce qu'explique Henri Paquet, troisième adjoint au maire du François, en charge des affaires sociales et vice président du CCAS :
Dans un premier temps, un courrier est adressé aux familles et personnes éligibles, elles se présentent au CCAS avec la lettre et une pièce d'identité. Le bon leur est remis, et sera présenté lors de l'achat de la bonbonne de gaz chez les commerçants qui remettra au bénéficiaire un double du bon, et gardera l'original signé du bénéficiaire
Des astuces quotidiennes
Au siège de l'association de Saint-Vincent de Paul situé dans le bourg du Lamentin, Marie-Claire Bobi, la responsable de l'épicerie solidaire rencontre beaucoup de foyers en difficulté depuis plusieurs mois. Ce sont généralement des mères de famille seules avec enfants qu'elle oriente pour économiser leur bouteille. Car si le président de la République a décidé d'attribuer aux 5,8 millions de ménages bénéficiaires d'un chèque énergie de 100€, ce nouveau chèque leur sera envoyé en décembre 2021 sans aucune démarche de leur part. Pour l'instant mis à part cette proposition, aucun dispositif spécifique de l'état n'existe.
Marie-Claire Bobi propose donc des astuces quotidiennes à ces bénéficiaires pour réduire l'impact de cette hausse des prix sur leurs conditions de vie :
Plutôt que de cuire deux pilons de poulet, ils vont cuire le sachet en entier, et congeler le poulet déjà cuit. A lieu de cuire les haricots rouges, pour économiser le gaz, ils vont préférer acheter en conserve
La hausse des prix de l'énergie continue sa course, même si le président du conseil exécutif a réclamé auprès du gouvernement un plafond pour le prix du gaz. Une initiative restée lettre morte jusqu'ici.