Olivier Decoster, soignant arrivé en renfort jeudi : "les soignants du CHUM nous ont accueillis avec bienveillance"

Par 14/09/2021 - 16:12 • Mis à jour le 14/09/2021 - 17:11

Olivier Decoster, infirmier diplômé d’Etat spécialisé en soins d’urgence et directeur d'une clinique du Grand Est, fait partie des soignants arrivés en renfort jeudi dernier (9 septembre) en Martinique et insultés à leur sortie de l'aéroport Aimé Césaire. Malgré la surprise initiale, l'incident n'a pas ébranlé sa volonté de prêter main forte aux équipes soignantes sur place, à bout de souffle.

    Olivier Decoster, soignant arrivé en renfort jeudi : "les soignants du CHUM nous ont accueillis avec bienveillance"

Des renforts surpris par les insultes

Une centaine de soignants venus en renfort pour faire face à la pandémie de Covid-19 qui sévit sur l'île ont été hués et insultés à leur arrivée jeudi dernier. 

Parmi eux, Olivier Decoster s'est porté volontaire, suite à l'appel du ministre de la Santé et des Solidarités demandant à tous les soignants de l'hexagone de venir aider le territoire. Ce directeur général de l'hôpital privé de la Miotte à Belfort, dans l'est de la France, a ainsi tenu à apporter son aide en tant qu'infirmier diplômé d’Etat, spécialisé en soins d’urgence. Car des situations sanitaires extrêmes, il en a déjà vécu. La région du Grand-Est où il officie est l'une des premières a avoir subi une vague épidémique de grande violence. Ce professionnel de la santé sait combien il est important de prêter main forte aux équipes déjà submergées.

Alors l'accueil qu'il a vécu jeudi soir a pu surprendre, mais n'a pas ébranlé sa volonté de mener à bien sa mission de santé :

On est surpris, un peu déstabilisé, et on se demande effectivement ce qu'on vient faire dans cette galère. Mais au delà de l'instant, notre mission et notre réflexion l'emportent. Beaucoup de nos jeunes ont été désagréablement surpris, mais je suis un vieux briscard de la santé, et je peux comprendre le mécontentement de certaines personnes qui font des amalgames et ne comprennent pas que la mission d'un soignant est de soigner

D'autant que cette action s'inscrit dans un élan de solidarité :

On est venu soutenir une démarche soignante locale. On n'est pas venus pour remplacer les soignants martiniquais dans leur savoir-faire ou leur savoir-agir. On est venus soutenir des soignants qui étaient en difficulté, liée à cette épidémie du Covid qui a mis à mal le système. Donc notre volonté de venir accompagner ces professionnels était un élan du coeur

Mais les soignants ont pu prendre du recul sur l'incident :

Être accueillis de cette manière à l'aéroport a été mal compris par les soignants que nous sommes. Mais une fois que nous étions dans le bus, on en a souri. Parce que je crois qu'il manquait quelque part une explication, et que les pouvoirs publics auraient peut être pu faire de la pédagogie sur la volonté de ces jeunes et moins jeunes à venir apporter un coup de main à ces professionnels qui sont en souffrance

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Un accueil bienveillant de la part des soignants du CHUM

Les renforts ont cependant trouvé un véritable soutien auprès des équipés médicales du CHU de Martinique :

Les soignants du CHUM nous ont accueillis avec bienveillance et se sont excusés au nom de ces personnes, en nous expliquant que la Martinique, ce n'était pas ça. J'estime que ce n'était pas à ces soignants de faire des excuses, puisque de toutes manières, la démarche était derrière nous. Mais il y a eu un élan du coeur aussi de ces soignants, qui ont bien compris que notre présence était faite pour leur permettre de récupérer

Et cette réalité a été démontrée à l'infirmier dès sa prise de fonction à l'hôpital Pierre Zobda Quitman à Fort-de-France. Il est envoyé dans la nuit au service des urgences pédiatriques pour remplacer une soignante victime d'un malaise. Ce volontaire qui n'avait pas été en contact immédiat avec des patients depuis 20 ans a du replonger dans la réalité du soin, grâce à l'aide qu'il a reçu en retour de ses collègues martiniquais :

Je me suis remis sur le vélo, je reconnais que cette solidarité de la part de mes collègues martiniquais, je l'ai pris comme une bouffée de chaleur car j'étais dans une insécurité la plus totale, dans une zone d'inconfort. Et le fait d'être accueilli, d'avoir un regard bienveillant de la part de ces soignants et soignantes, m'a fait un énorme bien par rapport à l'accueil que nous avions eu jeudi soir

L'adaptation a donc été le maître mot, pour savoir comment aider les services hospitaliers du CHU de Martinique :

Je ne viens pas changer, je viens en renfort, c'est à dire que je m'adapte à ce qui va m'être demandé. Et d'ailleurs, cet état d'esprit est prégnant : on est là, on nous utilise pour ce que nous sommes, et ce que nous sommes en capacité de faire. Il faut reconnaître une chose : les locaux ont une manière de travailler qui est extraordinaire. Sincèrement, je vois de l'abnégation, de la solidarité, du soutien, du pragmatisme, du savoir-faire, du savoir agir

D'autant que la mission de ces professionnels de santé venus de l'hexagone n'a rien d'une sinécure :

Je tiens à le dire : nous ne sommes pas en vacances. On ne va pas à la plage, on ne se baigne pas, on est soumis aux mêmes règles de confinement que la population martiniquaise, je vais faire mon footing le matin à 1 km de l'hôtel, quand je reviens j'ai un repas chaud, ou un repas froid quand je pars dans les services. Nous sommes soumis aux mêmes règles que tout le monde et nous n'avons aucun avantage lié à ce déplacement 

Ces équipes soignantes permettent ainsi aux équipes du CHU de Martinique de faire face à l'afflux de malades gravement atteints du coronavirus. Aujourd'hui mardi 14 septembre, 319 sont hospitalisés pour cause de Covid-19, dont 104 sont en soins critiques. Si l'épidémie de Covid-19 décélère sur l'île, la tension hospitalière reste vive.

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