Evasion au CHU : le dantesque travail des enquêteurs pour retrouver les membres du commando
Si un seul membre présumé du commando qui a fait libérer Walter Pérez Caruso est jugé ce mercredi, les enquêteurs agissant sous l'autorité de la JIRS de Fort-de-France ont mené un travail de fourmi pour mettre à jour l'ensemble de l'organisation derrière cette affaire.

Wilfer Fernando Ordonnez comparaît depuis ce matin dans le cadre de cette évasion pour le moins rocambolesque survenu le 8 décembre 2016 au CHU de la Martinique.
Face au président, l’homme de 47 ans commence par nier toute implication : "Je n’ai rien à voir avec cette affaire. J’ai connu des personnes que je n’aurais pas dû fréquenter", affirme-t-il d’un ton détaché. Lorsqu'on lui demande s'il connaît Walter Perez Caruso, là aussi il nie.
Relations extra-conjugales
Interrogé sur son mode de vie, il évoque d’abord des petits boulots dans le transport. Puis, après plusieurs relances, le quadragénaire parle d’un commerce de vêtements, de chaussures et d’or en Colombie, de taxis non déclarés et de véhicules partagés avec la mère de son fils.
Il raconte aussi avoir multiplié les voyages – entre le Venezuela, la Martinique, la France et le Portugal. Souvent sans motif précis. Parfois avec sa femme, parfois avec sa maîtresse. C'est d'ailleurs en compagnie de cette dernière qu'il a été arrêté en provenance de Colombie à l’aéroport de Roissy à Paris le 4 mars 2025 alors qu'il faisait l'objet d'un mandat d'arrêt international.
Toujours lors de cet entretien préliminaire avec le président, il reconnaît plusieurs liaisons extra-conjugales, récemment révélées à son épouse, étonnamment présente à l’audience. Cette dernière qui a éclaté en sanglots dès l'arrivée de son époux dans le box des accusés, accueille, abattue, ces aveux d'infidélité par de simples mouvements de tête.
Nombreuses contradictions
Au fil de l'audience, les contradictions s’enchaînent. Son auto-portrait de modeste chauffeur tranche avec ses nombreux voyages passés. À nouveau interrogé par le président, il reconnaît 7 des 22 visages présentés sur une planche photographique – dont plusieurs seraient directement impliqués dans l’évasion.
Les enquêteurs qui ont notamment travaillé sur la base de relevés de liaisons téléphoniques ont réussi à dessiner le réseau qui s'est mis en place pour faire évader le narco-trafiquant.
Ainsi, lorsque le prévenu évoque une rencontre importante, celle de Glawdys Munos, sur la plage des Trois-Îlets, le travail des enquêteurs permet d'établir qu'il s'agit de la compagne de Walter Perez Caruso.
Au fil des auditions et sur la base de renseignements, ils réussissent même à localiser les différents logements des membres présumés de l'opération. Wilfer Fernando Ordonnez, par exemple, qui est venu deux fois en Martinique en 2016, la seconde en bateau depuis le Venezuela, a séjourné à l'hôtel du Village de l'Impératrice entre l'Anse Mitan et l'Anse à l'Âne. D'abord seul, puis avec deux autres individus. Une adresse qu'il quitte 5 jours avant l'évasion pour un appartement situé au village créole.
Sur le parking du CHU, un porte document présentant le logo de l'hôtel sera retrouvé quelques minutes après le départ du commando.
Complicités locales
L'équipe élargie qui est soupçonnée d'avoir participé à l'opération semble composée de nombreux sud-américains ou hispanophones. On retrouve notamment la trace de deux anciens co-détenus de Walter Pérez Caruso.
Les enquêteurs ont aussi identifié des individus résidant en permanence en Martinique. Par exemple, les deux motos qui auraient servi à exfiltrer le trafiquant uruguayen aurait été achetées par un Lamentinois.
Wilfer Fernando Ordonnez a aussi été en contact avec un homme qui travaillait à l'Anse Mitan. Il l'aurait aidé à changer et transférer de l'argent.
Autre méthode identifiée par les responsables de l'enquête : le recours à des prête-noms ou à l'usurpation d'identité pour acquérir des téléphones portables et des lignes afférentes.
Des éléments accablant que l'avocat parisien de la défense va devoir démonter un à un. Avant cela, il devra écouter les témoignages des quatre agents pénitentiaire qui escortaient Walter Perez Caruso ce jour-là.
Trois d'entre eux ont été mis en joue par deux membres du commando. C'est le détenu qui était intervenu pour empêcher à ses comparses d'ouvrir le feu.
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