TRANCHES D'HISTOIRES : l’évasion du 16 juin 1985

Par 16/06/2018 - 15:48 • Mis à jour le 18/06/2019 - 13:29

Le 16 juin 1985, 4 guadeloupéens s’évadent de la prison de Basse-Terre. Un coup de tonnerre en ce dimanche matin de la fête des pères. Trente années après, nombreux sont ceux qui se souviennent de ce moment où la nouvelle s'est repandue. Cette évasion se situe dans un contexte politique troublé par des attentats contre les symboles français, revendiqués par l’Alliance Révolutionnaire Caraïbe (ARC) tant en Guadeloupe qu’en Martinique ou en Guyane.

    TRANCHES D'HISTOIRES : l’évasion du 16 juin 1985

L’ARC qui succède au GIA (groupe de libération armé) se fait connaître en mai 1983 par une série de 16 attentats commis aux Antilles mais aussi à Paris. D’autres actions suivront jusqu’en 1984. 15 bombes explosent dans 11 communes. Moins d’un an avant l’évasion, 4 militants de l’UPLG perdent la vie dans l’explosion de leurs bombes à Pointe-à-pitre, ce qui créera un trouble car ce drame se déroule sur fond de négociation entre représentants de l’Etat venus en Guadeloupe et les dirigeants de l’ARC. Luc Reinette et Henri Amedien alors qu’ils combattaient dans le marronnage, sont arrêtés le 27 novembre 1984 et emprisonnés, tout comme Henri Peratout et Humber Marboeuf incarcérés à Pointe-à-pitre.  C’est de la rencontre et du regroupement de ces 4 hommes que va naitre l’idée de l’évasion du 16 juin 1985.

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Luc Reinette avait auparavant été arrêté à dans les hauteurs de Goyave en compagnie d’Henri Amedien, le 27 novembre 1984. Emmenés à la gendarmerie de Capesterre-Belle-Eau puis celle de Basse-Terre. Les deux hommes sont ensuite transférés en prison le soir même de l’arrestation. Luc Reinette était recherché et en marronnage depuis plus d’un an, Henri lui était à l’époque inconnu de la police. Emprisonnés durant plusieurs moi, les 4 militants mettent en place leur idée de s’enfuir de la maison d’arrêt du chef lieu. Une opération préparée pendant plusieurs jours. La traque qui a suivi a été l’une des plus importantes en Guadeloupe. Des centaines de gendarmes, de chiens policiers ont organisés des battus sur terre, en mer et même dans les airs.  

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Juste avant cette arrestation, trois militants de l’UPLG, François Casimir, membre du Syndicat général de l’éducation, Fred Pineau, agriculteur et secrétaire général de l’association Kudme ainsi que Michel Uranie, infirmier psychiatrique, sont tués dans l’explosion des bombes qu’ils transportaient dans leurs véhicules à Basse-Terre et à Pointe-à-Pitre. Jack Berthelot, architecte spécialiste de l’habitat créole de renommée internationale, décède pendant son transfert à l’hôpital. Le 31 janvier 1985 à Pointe-à-Pitre, la voiture du procureur de la république Jean-Luc Beck et deux villas appartenant à des colons sont incendiées. En février 1985 c’est l’ouverture du procès de six militants du MPGI à Pointe-à-Pitre. Les prévenus, Marie Line Beter, Jacques Grizelin, Humbert Marboeuf, Joël Nankin, Henri Peratout et Luc Reinette, sont accusés d’avoir perpétré un attentat contre Radio caraïbe internationale en novembre 1983. Un septième prévenu, Michel Louis-Sidney, est en fuite.

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Entrée de la prison de Basse-Terre

Le 4 février 1985 Luc Reneitte, debout dans le box des accusés, déchire sa carte nationale d’identité française et en 18 véritable pouvoir démocratique doté d’un parlement, d’un gouvernement et autres institutions démocratiques, et doté des attributs de la souveraineté. Le 21 juillet 1987, Henri Amédien, Henri Bernard est condamné à dix-huit ans de prison, Michèle Favre ainsi que Luc Reinette, sont plus tard arrêtés sur l’île de Saint-Vincent, état souverain membre du Commonwealth, à bord d’un avion privé piloté par Georges Maréchaux, pendant une escale vers le Guyana, ancienne colonie hollandaise leur ayant accordé l’asile. Ils sont conduits au SRPJ.

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Le préfet Yves Bonnet déclare que ce coup de filet réalisé au moment où se tenait une réunion du Fonds monétaire international sur la dette des états caribéens, est « le fruit d’une intense activité diplomatique française dans les Caraïbes ». Les militants arrêtés sont placés sous mandat de dépôt. Luc Reinette est incarcéré à Fleury-Mérogis. Jacques Chirac, premier ministre, est accueilli à Pointe-à-Pitre par plusieurs centaines de militants et sympathisants du RPR. Il salue la « Guadeloupe calme et retrouvée », faisant allusion aux arrestations de Saint-Vincent. Finalement, une amnistie votée par l'Assemblée Nationale fera libérer quelques temps plus tard les condamnés politiques.

 

Images&Sources : "L'evasion du 16 juin 1985" edition Nestor, Résistance et luttes armées aux Antilles