[Série musiques traditionnelles 3/5] Quand les pionniers du Zouk ne se reconnaissent pas dans sa nouvelle forme
Pour le troisième épisode de cette série, qui met à l'honneur les musiques traditionnelles de l'archipel, c'est le Zouk qui est mis en avant, un style qui a subi beaucoup de changements depuis sa création.
Dans les années 80, la musique guadeloupéenne se cherche, tiraillée entre ses musiques anciennes, rappelant le sombre passé relatant l’esclavagisme comme le Gwoka ou le quadrille, et les débuts des musiques plus moderne, comme le Jazz ou le Blues la Guadeloupe n’a pas son mot à dire en termes d’expression artistique. C’est sur cette mentalité que le Zouk de Kassav’, ou de la Compagnie créole ont fondé un style de musique original et propre à l’archipel, le Zouk. Dans une quête identitaire, quelques amis décident de fonder en 1979 un groupe de musique pour donner à la Guadeloupe une musique à la fois représentative et commerciale. Ainsi, Kassav’ et son légendaire zouk débarquent chez les disquaires et envahissent les rues du Papillon.
L’apparition du zouk était simplement pour qu’on puisse se montrer
Immédiatement, le groupe connaît un succès insatiable, notamment avec les titres « Syé Bwa » ou alors « Ou lé ». Depuis, la Guadeloupe est affiliée à ce mouvement, « nous avons créé quelque chose d’énorme, personnellement, cela me permet d’en vivre encore à ce jour » déclare Willy Salzedo. Mais ce dernier s’est retiré de la musique il y a quelques années maintenant : « Je ne me reconnaît plus dans le Zouk d’aujourd’hui, il n’y a plus de message, cela ne me plaît pas », désole-t-il.
Un changement qui ne fait pas l’unanimité
Écouter du Zouk aujourd’hui, c’est simplement dans un but de danser, mais il y a une quarantaine d’années, le style avait pour volonté de passer un message, « on voulait être reconnu, on était fier d’être Guadeloupéen, se souvient Willy Salzedo, et on le montrait ». Pour lui, la musique en général est devenue une simple manière de faire de l’argent, et non plus une manière de s’exprimer, ce qui corrompt la façon dont les artistes produisent leurs musiques. Avec l’arrivée des plateformes de streaming, internet, et surtout la disparition progressive des disques physiques, la musique est à l’heure de la fast-food musique, ou, comme Willy Salzedo aime l’appeler « la musique Kleenex, comme un mouchoir, vous l’utilisez une fois puis vous la jetez » dit-il en riant.
Pour l’ancien pianiste, le seul point positif de ce changement, c’est l’apparition d’une énergie nostalgique, qui permet à Willy de continuer à vivre d’une musique qu’il a produite il y a quarante ans ! C’est tout de même une chose qui le rend malheureux :
Je ne comprends pas pourquoi notre musique suscite autant d’engouement, la nostalgie n’était pas un sentiment commun à mon époque ! Mais je ne me plains pas, rien que la semaine dernière, je me suis produit dans le restaurant juste à côté, affirme-t-il avec un large sourire.
Mais Willy Salzedo, essaie de relativiser, c’est la société, les labels et l’urgence de faire de l’argent qui engendre le comportement des artistes « en aucun cas je ne juge les artistes Zouk d’aujourd’hui, c’est simplement un constat, et une affirmation lorsque je dis que je ne me reconnais plus dans la musique à laquelle j’ai contribué à la création » conclue-t-il.
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