Quelle est la situation du narcotrafic aux Antilles ? Le Sénat s’est penché sur la question
Au Sénat, la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France s'est intéressée à la situation aux Antilles ce lundi 18 décembre. Ces travaux, lancés à l'initiative de la majorité sénatoriale, doivent s'achever en mai 2024. Les membres de la commission ont donc auditionné par visioconférence plusieurs acteurs de la lutte contre les trafics dans nos deux îles. Compte-rendu d’audition.
Direction interrégionale des douanes, Office antistupéfiant caraïbes, commandant de gendarmerie et commissaire de police ou encore magistrats ont été auditionnés ce lundi dans le cadre de la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France, et notamment aux Antilles, dont la sénatrice Catherine Conconne est membre. Les présidents d'associations des maires ont aussi été entendus. Dans plusieurs séquences, chacun a pu exposer l'état de la menace et aussi formuler des propositions.
Un trafic étendu
« Une passoire », c'est le terme qui est souvent revenu au cours de ces auditions pour qualifier la situation des Antilles face au trafic de stupéfiants. Et cela ne concerne pas que des parties de territoire, comme l'a indiqué Justin Pamphile, le président de l'Association des maires de Martinique.
C'est toute l'île qui est touchée, du nord au sud.
Face à une économie de la criminalité qui s'est développée, il faut, selon les élus locaux, plus de moyens humains et technologiques, plus de coopération pour la surveillance des côtes, notamment. Et pourquoi ne pas regrouper les services pour plus d'efficacité ? C'est la proposition faite par Jocelyn Sapotille, président de l'Association des maires de Guadeloupe.
Cette autorité-là pourrait être une autorité à la fois pour qu'il y ait de la cohérence, de la concordance sur nos deux îles.
De leur côté, les forces de sécurité, douanes, OFAST, gendarmerie ont évoqué le nécessaire renforcement des moyens aériens, la mise en place d'unités nautiques de surveillance technologique, par exemple. Ce qui a aussi été mis en avant, c'est le nombre croissant de mules aux Antilles depuis les contrôles systématiques réalisés en Guyane. La commissaire Camille Blanc-Tichy est chef du service territorial de la PJ de Guadeloupe.
En 2023, on est déjà à 48 mules et en très grande majorité, ce sont des mules incorporées qui ont donc ingéré des boulettes de cocaïne. Il y a une double problématique. Ce sont à la fois des mules qui, effectivement, transitent par les Antilles et qui arrivent de Guyane et qui partent ensuite par la métropole. Mais on s'est aperçu qu'il y avait également des filières d'approvisionnement locales des mules.
Un manque de coopération ?
Le phénomène des mules a aussi été confirmé par les magistrats auditionnés par la commission d'enquête. Ces derniers ont salué la nomination d'un magistrat de liaison à Sainte-Lucie, mais elles ont aussi souligné la nécessité d'améliorer la coopération interrégionale et aussi la coordination des services. Caroline Calbo, procureur de la République de Pointe- à-Pitre.
Moi, je suis assez étonnée de devoir impulser plus les choses entre eux. Je ne sais pas si l'OFAST se parle entre l'OFAST de Guyane, de Martinique et de Guadeloupe, mais également avec les avec Paris, puisque c'est là aussi que va atterrir toute la cocaïne. Et j'ai l'impression qu'il y a eu quand même pas mal de loupés à ce niveau.
Au cours des auditions, des inquiétudes ont également été relayées, par exemple sur le futur Grand Hub portuaire aux Antilles. Projet qui pourrait, selon les intervenants, présenter le risque de voir s'accroître encore le trafic de stupéfiants dans la zone.