Le procès des orpailleurs clandestins, tueurs présumés de deux militaires français en Guyane, reporté au vendredi 14 octobre 2016
Par Jean-Philippe LUDON, @jpludonrci
12/10/2016 - 22:55
• Mis à jour le 18/06/2019 - 15:19
Martinique
Mal parti avec l'arrivée tardive d'un accusé à l'audience et une absence de convocation de deux autres, le procès des orpailleurs clandestins brésiliens, tueurs présumés de deux militaires français en Guyane, prévu lundi 10 octobre 2016, a finalement été reporté au vendredi 14 octobre 2016. Les familles des victimes venues à Fort-de-France, ont craint un moment le renvoi à une session d'Assises courant 2017.
Dans la salle des pas perdus du palais de justice de Fort-de-France, ce
lundi 10 octobre 2016, il est déjà plus de 16:00. Me Lionel
Béthune de Moro, avocat à Angoulême, échange avec ses clients sur
le renvoi du procès des quatre orpailleurs brésiliens. Quelques temps
auparavant, au terme d'un débat contradictoire entre avocats de la défense
et de la partie civile, le président de la Cour d'Assises
spécialisée* a ordonné le report du procès au vendredi 14
octobre 2016.
Un procès initialement prévu du lundi 10 octobre au mardi 18 octobre 2016. Celui de quatre hommes poursuivis pour le meurtre en bande organisée de deux militaires français en Guyane.
Quatre jours d'attente supplémentaires pour les familles de l'adjudant-chef Stéphane Moralia**, 28 ans, et du sergent Sébastien Pissot**, 33 ans, pour comprendre pourquoi leur mari, fils et frère ont perdu la vie, le 27 juin 2012, dans une embuscade au cours d'une opération de lutte contre l'orpaillage illégal à Dorlin, sur le territoire de la commune de Maripasoula.
Cela fait déjà 52 mois qu'elles attendent cela. Les deux familles tenaient à faire le déplacement jusqu'à la Cour d'Assises Spécialisée de Fort-de-France chargée de juger les affaires de crime en bande organisée instruites par la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Fort-de-France.
Les Moralia viennent du Tarn, les Pissot de Charente.
Au terme d'une "journée chaotique", c'est l'heure du débrief. L'ouverture du procès le matin reportée déjà au début de l'après-midi. L'avion d'un des accusés transféré de Guyane n'arrivant qu'à 11:30. En début d'après-midi, à 14:30, un nouvel épisode vient contrarier l'ouverture du procès. On sait que sur les quatre accusés, deux ne peuvent pas être présents.
Et pour cause, ils sont déjà en prison dans leur pays. Le Brésil où ils ont été condamnés à perpétuité.
Il s'agit de Manoel Moura Perreira alias Manoelzihno. Ce Brésilien de 29 ans (aujourd'hui) est considéré comme le chef présumé du gang à l'origine des tirs avec des armes de guerre sur les militaires français. Et de son complice Ronaldo Silva Lima alias Brabo Da Morgana, 36 ans (aujourd'hui).
Et en l'absence de convention d'extradition entre le Brésil et la France, aucune chance de les voir répondre à une citation à comparaître devant cette Cour d'Assises. Sauf que d'un point de vue formel, cette démarche doit être faite par le parquet général. Il semble qu'elle ait été oubliée ou tout au moins pas faite dans les temps pour un procès débutant le 10 octobre 2016.
Le président de la Cour et ses deux assesseurs s'en rendent compte. Un débat contradictoire entre les avocats (partie civile et défense) a lieu. Trois options sont en discussion.
Soit, un renvoi à une session d'Assises ultérieure, courant 2017 ; soit une disjonction du dossier, les deux accusés présents sont jugés et les 2 autres plus tard, dans le cadre d'un autre procès ; soit enfin un report à une date la plus proche.
Au terme de ce débat et au grand soulagement des familles, le président de la Cour d'Assises ordonne le report du procès à ce vendredi 14 octobre 2016.
En clair pour Me Béthune de Moro, l'avocat des familles des militaires tués, "les deux accusés présents et les deux accusés qui sont actuellement (en prison) au Brésil seront jugés. Deux d'une manière contradictoire et deux "par défaut criminel". Et on évoquera l'intégralité des faits".
Reste que selon cet avocat des parties civiles, on a frôlé "le fiasco judiciaire" au cours la journée de lundi. "Une journée où on a tenté de pallier certains manquements et certaines incuries (...). Le fait d'oublier de citer, deux accusés, ça me paraît gravissime et ça me paraît être un oubli qui est attentatoire, à la mémoire des défunts, à tous ces gendarmes qui sont présents blessés, aux familles, à tout ce que l'on attend de cette institution judiciaire qui porte le nom d'une vertu (...). Et, on attend du parquet général qu'il soit à la hauteur de ce procès qui commence vendredi", conclut Me Lionel Béthune de Moro.
Jean-Claude Moralia, le père de l'adjudant-chef Moralia, est de Carmaux, près d'Albi dans le Tarn. Il est aujourd'hui enseignant après avoir servi dans l'armée. De cette journée chaotique du 10 octobre, il en tire un sentiment à la fois de colère et de révolte mais aussi paradoxalement de soulagement.
"On se rend compte, dit-il, qu'une affaire quand même importante n'est pas tout à fait boucler".
"Mais aussi de la révolte, parce qu'on a été à deux doigts de reporter cette affaire à une date ultérieure", poursuit Jean-Claude Moralia, tout en soulignant que sa venue, avec sa femme et ses deux filles pour suivre le procès, malgré l'aide judiciaire et d'associations, représente un investissement matériel et financier est assez lourd.
Florence Pissot, veuve posthume du sergent Sébastien Pissot, exprime le même sentiment de colère.
"Je suis en colère. Je suis frustrée et déçue parce qu'il y avait bien deux personnes de présentes" pour répondre de leurs actes. Je pense que cinquante-deux mois, ça fait assez long pour me permettre à moi d'être en colère. De rajouter encore de la colère en plus du deuil et de la souffrance qu'on a depuis ce fameux 27 juin 2012".
Jean-Philippe Ludon
@jpludonrci
(*) Elle diffère de la Cour d'Assises spéciale qui traite à Paris des affaires de terrorisme et composée uniquement de magistrats professionnels.
(**)Stéphane Moralia et Sébastien Pissot était respectivement adjudant et caporal-chef au 9ème Régiment d'infanterie de Marine (RIMa)
Un procès initialement prévu du lundi 10 octobre au mardi 18 octobre 2016. Celui de quatre hommes poursuivis pour le meurtre en bande organisée de deux militaires français en Guyane.
Quatre jours d'attente supplémentaires pour les familles de l'adjudant-chef Stéphane Moralia**, 28 ans, et du sergent Sébastien Pissot**, 33 ans, pour comprendre pourquoi leur mari, fils et frère ont perdu la vie, le 27 juin 2012, dans une embuscade au cours d'une opération de lutte contre l'orpaillage illégal à Dorlin, sur le territoire de la commune de Maripasoula.
Cela fait déjà 52 mois qu'elles attendent cela. Les deux familles tenaient à faire le déplacement jusqu'à la Cour d'Assises Spécialisée de Fort-de-France chargée de juger les affaires de crime en bande organisée instruites par la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Fort-de-France.
Les Moralia viennent du Tarn, les Pissot de Charente.
Une journée chaotique...
Au terme d'une "journée chaotique", c'est l'heure du débrief. L'ouverture du procès le matin reportée déjà au début de l'après-midi. L'avion d'un des accusés transféré de Guyane n'arrivant qu'à 11:30. En début d'après-midi, à 14:30, un nouvel épisode vient contrarier l'ouverture du procès. On sait que sur les quatre accusés, deux ne peuvent pas être présents.
Et pour cause, ils sont déjà en prison dans leur pays. Le Brésil où ils ont été condamnés à perpétuité.
Il s'agit de Manoel Moura Perreira alias Manoelzihno. Ce Brésilien de 29 ans (aujourd'hui) est considéré comme le chef présumé du gang à l'origine des tirs avec des armes de guerre sur les militaires français. Et de son complice Ronaldo Silva Lima alias Brabo Da Morgana, 36 ans (aujourd'hui).
Et en l'absence de convention d'extradition entre le Brésil et la France, aucune chance de les voir répondre à une citation à comparaître devant cette Cour d'Assises. Sauf que d'un point de vue formel, cette démarche doit être faite par le parquet général. Il semble qu'elle ait été oubliée ou tout au moins pas faite dans les temps pour un procès débutant le 10 octobre 2016.
Le président de la Cour et ses deux assesseurs s'en rendent compte. Un débat contradictoire entre les avocats (partie civile et défense) a lieu. Trois options sont en discussion.
Soit, un renvoi à une session d'Assises ultérieure, courant 2017 ; soit une disjonction du dossier, les deux accusés présents sont jugés et les 2 autres plus tard, dans le cadre d'un autre procès ; soit enfin un report à une date la plus proche.
Au terme de ce débat et au grand soulagement des familles, le président de la Cour d'Assises ordonne le report du procès à ce vendredi 14 octobre 2016.
En clair pour Me Béthune de Moro, l'avocat des familles des militaires tués, "les deux accusés présents et les deux accusés qui sont actuellement (en prison) au Brésil seront jugés. Deux d'une manière contradictoire et deux "par défaut criminel". Et on évoquera l'intégralité des faits".
Reste que selon cet avocat des parties civiles, on a frôlé "le fiasco judiciaire" au cours la journée de lundi. "Une journée où on a tenté de pallier certains manquements et certaines incuries (...). Le fait d'oublier de citer, deux accusés, ça me paraît gravissime et ça me paraît être un oubli qui est attentatoire, à la mémoire des défunts, à tous ces gendarmes qui sont présents blessés, aux familles, à tout ce que l'on attend de cette institution judiciaire qui porte le nom d'une vertu (...). Et, on attend du parquet général qu'il soit à la hauteur de ce procès qui commence vendredi", conclut Me Lionel Béthune de Moro.
Des familles entre colère et soulagement
Jean-Claude Moralia, le père de l'adjudant-chef Moralia, est de Carmaux, près d'Albi dans le Tarn. Il est aujourd'hui enseignant après avoir servi dans l'armée. De cette journée chaotique du 10 octobre, il en tire un sentiment à la fois de colère et de révolte mais aussi paradoxalement de soulagement.
"On se rend compte, dit-il, qu'une affaire quand même importante n'est pas tout à fait boucler".
"Mais aussi de la révolte, parce qu'on a été à deux doigts de reporter cette affaire à une date ultérieure", poursuit Jean-Claude Moralia, tout en soulignant que sa venue, avec sa femme et ses deux filles pour suivre le procès, malgré l'aide judiciaire et d'associations, représente un investissement matériel et financier est assez lourd.
Florence Pissot, veuve posthume du sergent Sébastien Pissot, exprime le même sentiment de colère.
"Je suis en colère. Je suis frustrée et déçue parce qu'il y avait bien deux personnes de présentes" pour répondre de leurs actes. Je pense que cinquante-deux mois, ça fait assez long pour me permettre à moi d'être en colère. De rajouter encore de la colère en plus du deuil et de la souffrance qu'on a depuis ce fameux 27 juin 2012".
Jean-Philippe Ludon
@jpludonrci
(*) Elle diffère de la Cour d'Assises spéciale qui traite à Paris des affaires de terrorisme et composée uniquement de magistrats professionnels.
(**)Stéphane Moralia et Sébastien Pissot était respectivement adjudant et caporal-chef au 9ème Régiment d'infanterie de Marine (RIMa)