S'occuper de la santé mentale de nos jeunes après des années de crise
Pendant la pandémie, la santé mentale des Français s’est dégradée au fil des confinements : stress lié à la maladie, au décès et à l’impact des mesures sanitaires sur notre quotidien.
Les jeunes sont particulièrement touchés. 70 % des étudiants seraient ainsi en situation de mal-être d’après une enquête réalisée par l'institut CSA pour la mutuelle étudiante LMDE. Les prises en charge pour syndromes anxieux ou dépressifs sont aussi en forte hausse chez les adolescents.
Quel constat en Guadeloupe ?
Les études menées dans les différentes îles de la Caraïbe montrent toutes une recrudescence de troubles chez les enfants et les adolescents. En Guadeloupe, la crise sanitaire, mais également les violences en marge de la crise sociale en fin d'année 2021, ont eu un impact sur les jeunes, comme l'explique le docteur Marina Bloom, pédopsychiatre.
Sur 42 000 jeunes en Guadeloupe, il est à peu près 18 % qui présentent soit des signes de mal-être, soit carrément un trouble psychique. Ça représente donc 7 000 personnes pour la Guadeloupe.
Cette flambée du nombre de cas de jeunes en détresse s'observe aussi dans les demandes de prise en charge qui augmentent dans les structures spécialisées en Grande Terre.
Il existe quatre structures qui peuvent prendre, au niveau champ sanitaire, ce genre de problèmes. Les trois CMPP (ndlr : centres médico psychopédagogiques) sont débordés, et nous, l'EMADO (ndlr : équipe mobile adolescents de Grande Terre), le sommes aussi. Toutes les structures sont saturées parce qu'il faut en gros s'occuper de 7 000 ados en crise.
Les symptômes
Chez ces jeunes, les professionnels observent souvent les mêmes types de troubles :
Des troubles anxieux, ensuite des troubles de conduites et du comportement avec beaucoup de violence domestique. De la violence verbale et physique. Il y a beaucoup de crises dites classiques, c'est notamment quand l'ado casse des choses à la maison, les provocations, la position de rébellion, fuite, scarifications. Le troisième symptôme, le plus répandu, c'est les troubles dépressifs. Les symptômes, ce sont des difficultés scolaires, troubles des apprentissages, du langage, troubles psychomoteurs. Et après, bien sûr, on a tous les symptômes qui en découlent : troubles du comportement alimentaire, addictions aux écrans, au sucre aussi ...
Mais au-delà de ces signes dépressifs, certains adolescents peuvent avoir des pensées suicidaires, voire passer à l'acte. C'est pourquoi, en cas d'alerte, les proches sont invités à se rapprocher rapidement des professionnels de santé.
Où s'adresser ?
Face à un adolescent en détresse, il est parfois difficile pour les parents ou les proches de savoir vers qui s’orienter. En Guadeloupe, il existe différentes structures d’accompagnement. On peut en effet s’adresser à des spécialistes dans les cabinets de ville, mais aussi se rendre dans des établissements tels que les CMPP.
Mais avec la crise, le nombre de demandes de prises en charge a considérablement augmenté.
Pour pallier le manque, l'an dernier, l'EMADO Grande Terre, une équipe mobile de spécialistes des troubles psychiques, a vu le jour en Guadeloupe. Marine Montout y est cadre de santé :
Dans cette équipe, on trouve un médecin qui est responsable de la structure, un psychologue, deux infirmiers, un éducateur spécialisé, et moi-même, cadre de santé. Nous nous situons Impasse Léonel Bourguignon, aux Abymes.
L'équipe se déplace toutefois sur toute la Grande Terre pour aller au-devant des adolescents, précise Safy Deruel, infirmière au sein de la structure.
Notre mission première, c'est d'arriver à atteindre les enfants, les familles aussi, mais surtout les jeunes, qui sont souvent dans la non-demande, et même le rejet, alors qu'ils ont pourtant besoin d'une prise en charge.
Les professionnels insistent sur le fait qu'une solution est toujours possible avec les adolescents, souvent plus résilients que les adultes.