La fresque de 'mai 67' a été rénovée
La fresque symbolisant les dramatiques événements de mai 1967 à Pointe-à-Pitre a été rénovée. Elle a été inaugurée en 2007. Depuis, la fresque avait perdu ses couleurs. Plusieurs organisations de valorisation des peuples noirs ont décidé d'organiser des opérations de rénovation. Le résultat final été dévoilé ce vendredi, en présence de personnalités ayant vécues cette période, à l'instar de Serge Glaude, ancien membre du GONG.
La fresque relatant les terribles événements de mai 1967 à Pointe-à-Pitre fait peau neuve. Inaugurée en 2017, elle avait perdu ses couleurs ses dernières années. Plusieurs organisations ont décidé de lancer une opération de rénovation. Le CIPN (Comité International des Peuples Noirs), le MIR (Mouvement International pour les Réparations), le COPAGUA (Comité des Patriotes Guadeloupéens, des anciens militants et des ex-prisonniers de la première organisation indépendantiste) et le FKNG (Fos pou Konstwi Nasyon Gwadloup) ont financé les opérations de rénovation. Les travaux ont été confiés à l'artiste plasticien à l'origine du premier croquis, "Sanmyel". Les opérations se sont déroulées avec le concours des jeunes du réseau DMJ.
Lieu incontournable de l'histoire de la Guadeloupe
Pour Luc Reinette, fondateur et Président du CIPN, il est important de se souvenir et "de rendre hommage à tous ceux qui sont tombés en mai 67". "C'est un lieu incontournable", précise-t-il
Le parrain de l'opération de rénovation de la fresque est l'artiste Admiral T. Il n'a pas hésité une seconde à être associer à cette page de l'histoire de la Guadeloupe. "Vous ne pouvez pas rester indifférent à cette fresque lorsque vous passez devant, vous êtes obligé de vous poser certaines questions, parce que la fresque est poignante de réalité", déclare-t-il en créole. C'est une fierté pour le chanteur qui n'oublie pas ses origines, d'où il vient et où il va, c'est le message qu'il souhaite transmettre aux jeunes générations
'Mai 67'
L'année 1967 est marquée par l'agression raciste de Raphaël Balzinc, cordonnier ambulant et infirme, victime de l'attaque d'un chien. Le 20 mars 1967 à Basse-Terre, le gérant d'un grand magasin de chaussure n'accepte pas qu'un guadeloupéen passe sur le trottoir face à son enseigne. Il ordonne à son chien d'attaquer le pauvre homme : "dis bonjour au nègre !". Raphaël Balzinc est secouru par la foule, alors que le gérant les nargue. Cet acte raciste a été l'étincelle qui mettra le feu aux poudres, enflammant tout l'archipel, et surtout les villes de Basse-Terre et de Pointe-à-Pitre. Il s'ensuit un vaste mouvement social, marqué par la grève des ouvriers du bâtiment. Face à l'ampleur du mouvement contestataire le Préfet de l'époque, Pierre Bollotte, décide de réprimer le mouvement contestataire par la force. Il ordonne le déploiement des forces de l'ordre pour réprimer les contestataires. Selon les récits de l'époque, le représentant de l'Etat profite de l'occasion pour démanteler le mouvement indépendantiste. Le point culminant de ces événements sera atteint en mai 1967. Les 26, 27 et 28 mai sont marqués par de terribles répressions des gendarmes et des CRS (Compagnie Républicaine de Sécurité), avec l'appui de l'armée. Le 26 mai 1967 Jacques Nestor, jeune membre du GONG (Groupe d'Organisation Nationale de la Guadeloupe), est abattu par les forces de l'ordre sur la Place de la Victoire de Pointe-à-Pitre. Officiellement, on comptabilisera huit morts et des dizaines de blessés lors des "massacres de mai 67", selon le rapport de la 'Commission Stora' remis au Ministre des Outre-mer en octobre 2016. Officieusement, le nombre de victimes serait plus important pour les organisations militantes, la presse ou la population à l'époque. On évoque le chiffre de 87 victimes, voir d'une centaine de morts.
Serge Claude est un ancien membre du GONG. Il se souvient des événements de cette année-là et de la mort de Jacques Nestor. Il a d'ailleurs lui-même failli perdre la vie quand, avec deux camarades, ils croisent des soldats. Pour lui aucun doute, c'était des "légionnaires". Les trois militants se retrouveront face aux trois soldats, alignés, sur le point d'être exécuter. Ils réussiront à gagner du temps en leur parlant constamment et posant des questions sur les raisons de leur interpellation. Au final, ils survivront à ces événements