Que pèse l'octroi de mer dans les finances des collectivités locales ?
Les collectivités et les industriels des départements et régions d'Outre-mer s'opposent fermement à une possible modification de l'octroi de mer. Mais que pèse réellement cette taxe indirecte dans les finances de collectivités locales ?
Hier, une réunion s'est tenue en Martinique entre le monde de l'entreprise et l'exécutif de la CTM. Tous ont insisté sur le maintien de l'octroi de mer dans sa forme actuelle. Des négociations sont en cours entre Paris et Bruxelles en ce sens.
La direction générale de la fiscalité de la Commission européenne serait progressivement en train de prendre en compte les doléances des collectivités d'Outre-mer et des industriels de ces régions. Ces derniers tiennent au maintien de l'octroi de mer et surtout aux exonérations dont ils bénéficient pour protéger la production locale.
Du côté des collectivités, c'est une manne non négligeable qu'il s'agit de préserver. En effet, selon un rapport du Sénat publié en 2020, l'octroi de mer est la première recette fiscale des DROM. En 2018, le produit total de l'octroi de mer s'élevait à un peu plus de 1,2 milliards d'euros.
Près de la moitié des recettes fiscales des communes
En 2019, l'OM représentait 47% des recettes fiscales des communes de Martinique, 45,7% en Guadeloupe et 43,5% en Guyane.
Selon un rapport de l'Observatoire des Finances Locales datant de 2007, cette taxe indirecte représentait entre 25 et 35 % des recettes réelles de fonctionnement des communes et entre 14 et 29 % des recettes réelles de fonctionnement des Régions d'outre-mer.
En d'autres termes, les recettes générées par l'octroi de mer servent notamment à payer les salaires des fonctionnaires territoriaux.
Le même rapport indiquait qu'en 2007, les frais de personnel s'élevaient à 59% des dépenses de fonctionnement des communes d'outre-mer.
Un quart des taxes collectées
Pour bien visualiser le poids de l'octroi de mer dans les recettes fiscales en général, on peut également le comparer avec les autres impôts et taxes collectés en Outre-mer.
En Guadeloupe par exemple, en 2017, trois millions d'euros d'impôt sur le revenu ont été collectés contre 259,4 millions d'octroi de mer alors que l'impôt sur les sociétés a rapporté 78 millions d'euros.
En Martinique, la même année, l'impôt sur les sociétés a rapporté 101 millions d'euros de recettes fiscales, l'impôt sur le revenu a généré 2 millions d'euros alors que l'octroi de mer a rapporté 257,1 millions d'euros.
Dans les deux îles, l'octroi de mer représente plus de 25% des principaux impôts collectés.
À noter que les taux d'octroi de mer qui sont décidés par les Régions et les collectivités territoriales sont au nombre de 15 en Martinique et 11 en Guadeloupe.
Une vielle taxe
L'octroi de mer qui est collecté par les douanes est l'une des plus vielles taxes encore en vigueur. Elle s'incrit dans l'histoire coloniale de la France pour protéger les colonies des produits d'importation.
Créé en 1670 par Colbert qui est aussi le créateur du code noir, sous le nom de droit de poids, il devient l’octroi aux portes de mer en 1819. En 1992, l'Union Européenne décide que la production locale doit elle aussi être concernée par l'octroi de mer même si des régimes d'exonération sont également mis en oeuvre.