Raymond Amory, héros martiniquais oublié de la Seconde Guerre mondiale

« Les Martiniquais ont un héros et il a toute sa place dans la mémoire et l'histoire de la Martinique », affirme Romain Verardo qui s'est donné pour mission de faire connaitre l'histoire de Raymond Amory. Cet amoureux d'histoire passe tout son temps libre depuis un an à creuser la vie de ce Martiniquais, né à Fort-de-France en 1918, et mort à 22 ans en Normandie, au terme d'un combat épique. Un petit morceau de la grande histoire qui fascine ce passionné.

Il y a quelque chose qui fait que je me suis pris de passion pour lui, une sorte d'amitié historique, quelqu'un que j'aurais aimé connaître, quelqu'un que j'ai envie d'aider à retrouver sa place dans l'histoire.

Cette connexion s'est pourtant faite au hasard, alors que Romain Verardo s'intéressait au village d'Auvers, dans la Manche, d'où la famille de sa compagne est originaire, il a découvert un combat qui s'était produit dans le ciel de cette petite commune au petit matin du 18 juin 1940, lors duquel Raymond Amory a combattu quatre avions allemands en y laissant sa vie.

Sacrifice patriotique d'un descendant d'esclave

En poste à Querqueville à l'époque, le pilote martiniquais et ses compagnons d'armes avaient reçu l'ordre de rejoindre Rochefort face à l'inéluctable avancée de l'armée ennemie. C'est cet épisode qui a donné envie à Romain Verardo de retracer le parcours de ce descendant d'esclaves, devenu l'un des rares pilotes noirs de l'aéronavale, qui a héroïquement combattu, selon des articles de presse de l'époque, pour permettre aux autres appareils de son escadrille de fuir la zone que les Nazis s'apprêtaient à occuper.

Donner le sacrifice de sa vie pour un pays qui précédemment avait esclavagisé ses ancêtres, c'est une résilience très forte de sa part. Il y avait cette notion de sacrifice dès lors qu'il a engagé le combat. 

Tombé dans un marais à proximité d'Auvers, le Martiniquais n'a été retrouvé que quelques jours plus tard, mort, ayant vraisemblablement succombé à de graves blessures à la tête et à la jambe. Lors de ce combat, un avion allemand s'est également crashé sur les terres d'une ferme avoisinante, vraisemblablement abattu par Raymond Amory, même si ce fait d'armes ne lui a jamais été reconnu, faute de preuve, mais aussi en raison de la survie du pilote ennemi. Romain Verardo espère d'ailleurs que ces travaux permettront de lui attribuer cette victoire aérienne qui faisait le prestige des pilotes à l'époque, mais aussi pour donner le crédit légitime à cet acte de résistance avant l'heure, en ce jour historique du 18 juin 1940. 

Il faut se rappeler que Pétain avait demandé de collaborer, et le 18 juin, De Gaulle demande de résister. Le matin de ce discours-là, avant qu'on lui propose de devenir résistant par les mots de De Gaulle, avec ses camarades, ils ont eux-mêmes choisi de résister face à l'ennemi.

Retracer l'histoire familiale

Enterré à Auvers, Raymond Amory est encore honoré dans cette commune, où sa tombe est nettoyée et fleurie, une salle y porte également son nom, avec toutefois une faute d'orthographe. Outre cela et des mentions de sa « mort pour la France » sur des stèles à Toulon, Hyères et Fort-de-France, les traces restent maigres.

Romain Verardo a collecté quelques bribes sur son père Fernand Amory, né en 1902, militaire lui aussi, canonnier décédé au François, en Martinique, alors qu'il y était en permission avant la guerre. Sa mère, Marie Irène Jean, blanchisseuse, née en 1897 et morte à Toulon, ville où s'était établie la famille durant l'enfance de Raymond. C'est là qu'il avait fait ses premières classes militaires, avec brio, jusqu'à devenir pilote diplômé à Hourtin en décembre 1939, quelques mois seulement avant sa mort. Romain Verardo veut remonter ce fil familial et espère pouvoir compter sur des informations en provenance des Antilles.

Je continue à chercher et je me suis trouvé cette passion et cette envie de lui redonner, avec mes moyens, cette position qui est la sienne, du premier héros résistant de ce 18 juin 1940.

Ce nom à honorer sera le sujet du livre d'histoire que Romain Verardo veut écrire, avant peut-être d'en faire un personnage de bande-dessinée ou de film, car Raymond Amory, le pilote martiniquais avait assurément l'étoffe des héros pour celui qui veut lui rendre hommage. 

Il pourrait être un personnage de roman graphique, d'une BD ou d'un film. Il y a un épisode de « Star Wars », « Rogue One », où les héros meurent, mais d'une belle mort, le sacrifice d'une vie pour un pays et c'est ce qu'il a fait. Les avions allemands étaient supérieurs à tous les niveaux, clairement lorsqu'il a décidé de les affronter seul, avec une connaissance aussi poussée de l'aéronautique, il y avait la notion de sacrifice. Il a toute sa place parmi les héros de notre pays. 

Si vous disposez d'informations sur la vie de Raymond Amory, vous pouvez contacter Romain Verardo à l'adresse mail amoryauvers@protonmail.com. Une cagnotte en ligne a par ailleurs été ouverte pour soutenir le travail de cet historien amateur.