L'usage du glyphosate aurait accéléré la diffusion du chlordécone dans la nature

Par 04/02/2021 - 12:17 • Mis à jour le 04/02/2021 - 15:17

C'est un cocktail herbicide-pesticide qui pourrait s'avérer dramatique pour l'environnement aux Antilles. Selon une étude publiée par la revue Environmental Science & Technology, l'érosion provoqué par l'usage du glyphosate augmenterait la dispersion du chlordécone dans la nature.

    L'usage du glyphosate aurait accéléré la diffusion du chlordécone dans la nature

Le glyphosate, un herbicide, dont l'usage s'est répandu aux Antilles à la fin des années 1990, a libéré de grandes doses de chlordécone dans la nature, jusque là piégées dans le sol des bananeraies. Le pesticide a été conduit dans les cours d'eau et les sédiments du littoral.

C'est en tout ce qu'indiquent les preuves mises en évidence par une étude menée par plusieurs laboratoires dont le laboratoire EDYTEM de l’université Savoie Mont-Blanc au sein duquel Pierre Sabatier s'intéresse aux transferts de polluants dans la "zone critique". Cette couche allant de la canopée des arbres jusqu'aux nappes phréatiques, où interagit l’essentiel du monde du vivant.

Au terme de cette étude menée à Pérou en Basse-Terre (Guadeloupe) et au Galion (Martinique) sur des petites et grandes exploitations, les scientifiques ont pu parfaitement dater l'usage du chlordécone dans ces plantations.

Le recours à la radioactivité, c'est à dire à l'identification d'éléments radioactifs emprisonnés dans le sol, a permis cette datation précise. Les chercheurs ont ainsi pu distinguer l'usage du Képone de 1972 à 1978 puis du Curlone de 1982 à 1993. Ils ont aussi observé la baisse de la présence du pesticide dans les couches sédimentaires postérieures à l'interdiction définitive de 1993.

Une corrélation temporelle

En revanche, autour des années 2000 les flux de chlordécone sont 10 fois supérieurs à la période post interdiction. Au cours de leurs travaux, les chercheurs ont pu éliminer les modifications des conditions climatiques qui auraient accéléré l'érosion des sols.

Cette résurgence du chlordécone jusque là emprisonné dans la terre coïncide à l'usage plus intensif du glyphosate aux Antilles françaises à partir de 1997. La destruction des racines par désherbage fragilise les sols, favorise leur érosion par les pluies et remet en circulation un polluant piégé dans les particules des sols indique le site Sciences et Avenir qui fait mention de l'étude.

L'équipe de Pierre Sabatier a pu comparer les données de l'étude antillaise à une autre étude qu'elle avait mené sur la résurgence du DDT dans les sédiments d'un lac de Savoie, non loin de champs de vigne.

Cette corrélation entre l'usage d'un herbicide et la résurgence d'un pesticide à la durée de vie séculaire (entre 600 et 700 ans de présence dans les sols) prouve si il en était encore besoin qu'une véritable politique de dépollution des sols doit être lancée au plus vite dans nos territoires.

Écoutez l'entretien accordé par Pierre Sabatier à Jessica Dantin :

 

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