Un club de lycéens traque les sargasses

Par 31/07/2019 - 10:33

Sous la houlette de Gérard Escleyne, un professeur de physique retraité, et de Juerg Lichtenegger, un consultant de l'Agence spatiale européenne, un club de lycéens de Port-Louis observe et analyse les sargasses depuis 2015 avec des images de satellites pour mieux comprendre ces algues brunes, qui restent encore bien mystérieuses.

    Un club de lycéens traque les sargasses

D'où viennent-elles? Comment se forment-elles? Comment est-ce qu'elles se déplacent? Peut-on anticiper les échouages? C'est pour essayer de répondre à toutes ces questions et tant d'autres que le Club sentinelle en télédétection a été créé en 2015 au lycée de Port-Louis.

Gérard Escleyne, 76 ans, professeur de physique à la retraite et passionné de télédétection a fait appel à son réseau, dont Juerg Lichtenegger, un spécialiste en la matière, pour mettre sur pied ce programme unique dans l'archipel. Depuis, une première cohorte a pu profiter de l'expertise des deux hommes pour mieux comprendre ces algues qui viennent polluer nos plages depuis 2011. Une deuxième cohorte vient de conclure sa deuxième année avec "le vieux pilote", comme se décrit M. Escleyne.

Doutes et hypothèses

"Ce que je veux, c'est leur apprendre à douter", livre l'instigateur de ce projet. En observant les sargasses et leur parcours avec les satellites de l'Agence spatiale européenne, les jeunes ont ainsi pu tordre le cou à de nombreuses contre-vérités ou "vraies fausses bonnes idées", selon ce club.

Ainsi, pas question selon eux d'utiliser les sargasses comme engrais, car des traces de métaux lourds et d'arsenic ont été détectés dans ces algues. De même, il est inutile de les broyer en mer, car elles se reproduisent par bouturage et les disperser ne ferait que les faire proliférer. 

En quatre ans d'observation, les lycéens ont aussi pu détecter des masses incroyables, parfois de plus de 150 km de long au large des côtes africaines. Cela leur permet d'émettre des hypothèses sur leur provenance puisque les "radeaux" se trouvent souvent entre l'Afrique et l'Amérique du Sud, aux embouchures des fleuves Amazone et Congo. La déforestation pour l'exploitation minière d'un côté et agricole et aurifère de l'autre, avec la contamination des sols qui en découle, est notamment une piste, déjà partiellement validée par des chercheurs américains.

Poursuivre le travail

Les observations de ce petit groupe de lycéens sont régulièrement transmises à des instances officielles, comme l'ADEME, la DEAL ou le département et leurs travaux sont désormais reconnus. Le Club sentinelle sera d'ailleurs invité à participer à la conférence internationale sur les sargasses qui aura lieu en Guadeloupe en fin d'année.

Pour ce qui est de Gérard Escleyne, ce dernier envisage de prendre "la retraite de sa retraite" en 2020, mais il espère que ce projet sera pérennisé. Pour cela, il peut compter sur la passion de ses élèves, puisque certains membres de la première cohorte continuent d'animer le club, même en étant désormais en études supérieures.

Le dernier projet de la deuxième cohorte, qui entre en terminale à la rentrée, serait de se rendre en Guyane pour visiter les installations spatiales de Kourou, en début d'année prochaine. Pour cela, les sentinelles espèrent convaincre les décideurs de soutenir leur voyage en démontrant la qualité de ce petit club aux grands travaux à l'occasion de la conférence internationale. 


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