« Aucun intérêt pour les territoires », les parlementaires déçus par la nomination de Marie Guévenoux

Par 09/02/2024 - 08:22 • Mis à jour le 09/02/2024 - 09:32

La nomination de la nouvelle ministre déléguée aux Outre-Mer, Marie Guévenoux, a été officialisée ce jeudi 8 février, à Paris, mais ce choix est loin de satisfaire dans les rangs des parlementaires ultramarins. La plupart déplorent un manque de connaissance et d'intérêt concernant ces territoires.

    « Aucun intérêt pour les territoires », les parlementaires déçus par la nomination de Marie Guévenoux

La surprise a été bien gardée par l'exécutif. Dans ce remaniement à rallonge, plusieurs noms circulaient avec insistance pour prendre la succession de Philippe Vigier au ministère de la rue Oudinot, mais celui de Marie Guévenoux ne s'est pas fait entendre jusqu'à sa nomination officielle, ce jeudi 8 février, dans le communiqué envoyé par le Palais de l'Élysée.

Il faut dire que celle qui était jusqu'ici députée Renaissance n'a jamais manifesté d'intérêt particulier pour nos territoires dans ses travaux à l'Assemblée nationale, ce que déplore le président de la délégation aux Outre-Mer, le Guyanais Davy Rimane, membre du groupe GDR. 

On met les fidèles auprès de soi, c'est le dernier mandat d'Emmanuel Macron, donc ils se font plaisir entre-eux, c'est un arrangement entre amis. Ce qui est dommage, c'est qu'il n'y a aucun intérêt pour les territoires. Mme Guévenoux ne s'est jamais positionnée ou est intervenue dessus, il y a des personnes au sein de Renaissance, qui s'intéressent aux dits Outre-Mer, qui auraient pu se positionner, mais on a l'impression que ce sont des récompenses pour bonne conduite.

La plupart des élus antillais ne connaissant d'ailleurs pas vraiment Mme Guévenoux, en-dehors d'Olivier Serva (LIOT), qui avait siégé à ses côtés lors de la précédente mandature dans les rangs d'En Marche. Le Guadeloupéen en garde un bon souvenir, mais sans lui prêter un intérêt pour les Outre-Mer. 

C'est une femme affable, souriante, plutôt sympathique. Je ne lui connais pas une connaissance approfondie des Outre-Mer. Quand j'étais président de la délégation, elle n'y était pas, je ne crois pas qu'elle y soit là, je ne me souviens pas non plus de l'avoir entendue sur des sujets ultramarins, mais elle apprendra. Ce gouvernement ne comprend aucun Ultramarin, c'est un problème. La France est la France grâce à ses Outre-Mer. C'est une forme de désintérêt, de mépris. 

Repartir de zéro 

Marie Guévenoux elle-même lors de sa première prise de parole ce vendredi 9 février, a reconnu qu'elle allait devoir prendre le temps de sonder les enjeux des territoires. Alors que plusieurs grands chantiers sont engagés depuis juillet dernier et le lancement du CIOM, il s'agit déjà du troisième ministre délégué à prendre en charge ce grand plan de 72 mesures, annoncé par Jean-François Carenco, puis repris par Philippe Vigier.

Une situation qui inquiète certains, à l'image du député martiniquais Jiovanny William (GDR).

Je ne pense pas qu'elle a été présente dans le cadre des questions et des problématiques qui nous concernent. On devra de nouveau œuvrer de pédagogie, recommencer sur les sujets qui ont été abordés dans les ministères précédents, c'est dommage. Je ne présume de rien, j'espère que la ministre va très vite comprendre les problématiques de nos territoires. On a le sentiment de ne pas avoir des ministres qui connaissent, ou même qui affectionnent, les Outre-Mer. Je ne m'attendais à rien, mais je suis quand même déçu.

Cette "valse" ultramarine est aussi pointée du doigt par le Guadeloupéen Christian Baptiste, qui siège dans les rangs socialistes à l'Assemblée nationale. Pour ce dernier, l'exemple Philippe Vigier est la preuve de l'échec de cette gestion ministérielle. 

C'est une désignation qui a été faite au pif. Sur Philippe Vigier, l'histoire nous a donné raison, dans la mesure où il est venu nous mépriser, notamment concernant l'eau. Aujourd'hui, nous avons Marie Guévenoux qui ne connait pas les Outre-Mer, donc nous n'attendons pas grand-chose. À la rue Oudinot, c'est la valse des Outre-Mer, on a fait quatre ministres en vingt mois. 

Christian Baptiste dit toutefois espérer de l'ouverture de la nouvelle ministre déléguée sur le sujet budgétaire. Membre de la commission des Finances, ce dernier plaide notamment pour que des échanges spécifiques soient menés avec la délégation Outre-Mer de l'Assemblée nationale sur les missions qui nous concernent, avant les arbitrages du gouvernement.  

« Absence de volonté politique »

Du côté du Sénat, l'ancien ministre socialiste Victorin Lurel a publié un communiqué dans lequel il dit vouloir laisser le temps à la nouvelle nommée de faire ses preuves, tout en déplorant ces changements réguliers et la "marginalisation et la tutellisation" du ministère rattaché à celui de l'Intérieur. "Face aux enjeux majeurs qui se posent à nos territoires en matière sociale, économique,
environnementale et constitutionnelle, l’urgence est à l’action concrète, incarnée et portée par une ministre à l’écoute, déterminée et armée d’une pleine connaissance des défis auxquels nos peuples sont confrontés", insiste M. Lurel.

Plus ironique, la Martiniquaise Catherine Conconne a publié un message sur le réseau social X concernant les traditionnelles réactions à ces nominations ministérielles.

Notez que dans un communiqué conjoint, les premiers secrétaires fédéraux du PS de Guadeloupe et Martinique, Olivier Nicolas et Béatrice Bellay ont aussi regretté ce changement fréquent d'interlocuteur, qui "ne peut que renforcer le sentiment des élus et des populations des Outre-mer d’un manque de respect et d’une absence de volonté politique d’inscrire ces territoires dans les priorités gouvernementales".

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